vendredi 1 mars 2013

Tout est O-K à K-pital City 12






K-pital, 33 après Scott

Happé par le courant ascendant, Scott vit s'écarter les panneaux d'une bouche de métal.  Il fonçait droit vers l'ouverture.  Sa course se ralentit et les hémisphères de l'oeuf se refermèrent sur lui.
- Bienvenue dans cet ovotax, grésilla la voix synthétique de l'ordinateur de bord.  Quelle est votre destination?  Veillez à conserver une tenue décente, et découvrez votre sexe, si vous en possédez un.
Un scanner parcourut le corps de Scott.  Un voyant clignota:
- Nous avons le feu bleu.  Vous êtes conforme.  Où désirez-vous vous rendre?
Devant l'hésitation de Scott, l'ordinateur de bord suggéra:
- Les coordonnées de votre propriétaire sont inscrites sur votre collier.
Scott porta la main à son cou et constata qu'une bande de métal perforée y était fixée.  Il déchiffra du bout de l'index le tracé des caractères en creux:
- M.A.T.E.U.R.
L'oeuf s'arracha de sa position.  Comme sur un jet d'eau de baraque de tir, il jaillit au contre d'une fontaine de lumière et dansa un instant sur les rayons brisés.
A travers le pare-brise fumé, Scott découvrait le soleil aveuglant et le ciel intensément bleu.  Suspendu à une dizaine de mètres du sol, le vaisseau longeait les murs de soutènement de la citadelle.  Là-haut, il apercevait une villa fortifiée aux tentes jaunes et un amas de verdure et de fleurs débordant des créneaux.  L'ovotax survolait un vaste disque argenté formant une esplanade circulaire autour du piton rocheux.  Des statues d'amazones armées de fusils jalonnaient la circonférence.  Et ces statues bougeaient, visant les rares silhouettes qui se faufilaient à l'air libre.  Au-dessus du niveau supérieur de K-pital luit un ciel bleu, mais personne ne le regarde.
L'ovotax vira à quatre-vingt dix degrés et pénétra dans le flanc d'un bunker de granit.  Il décéléra en fuyant entre deux alignements de colonnes et se posa au pied d'une arche gigantesque au fronton de laquelle brillait la devise: Soumission, Ségrégation, Stérilisation.
Scott s'engagea dans la porte à tambour et se trouva dans une vaste salle ornée de tableaux et de statues.  Les grandes toiles à demi-lacérées représentaient exclusivement des nus masculins.  Les figures féminines 
avaient été découpées ou recouvertes d'un enduit noir.  Les grands portraits historiques d'hommes en costume étaient retouchés de façon à ce que les habits découpés laissent apparaître le sexe et les bourses toujours exagérés par rapport à la taille du personnage.  Aucune des statues, noires et friables, n'était complète et les pénis grossis maladroitement disparaissaient sous une masse d'emplâtres successifs.  Des vitrines regroupaient certains fragments originaux arrachés durant les guerres sexuelles, des colonnes de petits phallus minéraux disposés sur des présentoirs de soie mauve.  A côté, des bibliothèques vitrées contenaient les collections de godemichés anciens, taillés dans des bois d'animaux disparus ou façonnés dans un cuir piqué devenu mince; modèles électriques et électroniques, repeints jusqu'à imiter la teinte bleutée des veines saillantes, pourvus de systèmes éjaculatoires ou hérissés comme des bigoudis de piquants de plastique mou.
Tandis que Scott étonné comparait à son membre un de simulacres qui semblait en être la copie-conforme, un vieillard eunuque en blouse transparente tachée de peinture apparut par une porte dérobée.
- Suivez-moi, il faut vous présenter à votre maîtresse.

La Conservatrice est assise devant la coiffeuse qui lui sert de bureau.  Elle brosse ses longs cheveux gris.  Ses mamelles pendantes reposent sur le plateau en marquètterie du meuble.  Elle se tient sur un antique tabouret à vis, pénétrée d'un gode à double branche fiché en cul et en con.  Quand elle se lève, on voit que des lacets de cuir le maintiennent en place, et qu'elle peut se déplacer aisément en conservant l'objet à demeure.  Elle porte sur Scott un regard distrait:
- Voilà bien les rabatteurs!  Ils nous envoient un simple d'esprit nanti d'un appendice monstrueux, résidu probable de manipulations génétiques prohibées.  Et rouquin, qui plus est.  A la tonte, sans attendre la prochaine lune.  Conduisez-le à l'androcée à fin d'étude, avant de déterminer à quelle tâche nous l'emploierons.

Les Elues vivent protégées et retranchées dans les entrailles de la montagne.  L'essentiel de leurs jours, passés dans les centres de régénération et de blanchiment, est consacré aux soins du corps.  Ni le rêve que leur distille les codeurs, ni leur entraînement quotidien à la danse ne suffit à les distraire dans les périodes de latence qui séparent les célébrations de pleine lune.  Pour éprouver sans danger le frisson des passions viles si nécessaire à leur bonne santé, elles ont créé l'androcée.



L'androcée, que les K-pitaliennes appellent encore la "fosse aux ours'’ n'est rien d'autre qu'un zoo où sont confinées les bêtes entières.  Ce village d'esclaves est un vaste terrarium couvert d'un plafond de dalles de verre qui est la plancher réservé à la promenade quotidienne des Elues.  En divers endroit il s'épanouit en amphithéâtre autour des arènes dévolues aux jeux.  Munies de jumelles et de lunettes optiques, les citoyennes, comme des aquariophiles rivées aux parois de leur océan nain, déambulent, observant avec un intérêt fanatique les faits et gestes des bêtes carnivores.
Certaines, dévêtues avec recherche, portant cuissardes et boléro à seins nus promènent leurs animaux de compagnie, muselés et en laisse.  Ces mâles castrés, harnachés de corsets de bijouterie, rasés et marqués aux initiales de leur maîtresse, se déplacent à quatre pattes.  La plupart sont totalement édentés pour mieux remplir leur emploi de lècheur.  On leur a sectionné les cordes vocales et souvent extirpé les organes pairs confiés aux banques chirurgicales pour servir au rechapage des citoyennes vieillissantes.  Au plus fort du spectacle, les femmes s'asseyent sur le visage de leur bête et se font longuement masturber à coups de langue.  La Conservatrice, suivie de sa meute y parade, et les Elues désireuses de lui plaire la saluent au passage en s'écartant le sexe ou en faisant tinter les clochettes fixées à leurs anneaux clitoridiens.


                L'enclos

Le restaurateur a remis Scott aux Dresseurs, la milice affectée au gardiennage des troupeaux.  Ils portent des matraques électriques et sont secondés de chiens électroniques à crocs d'acier.  Le détachement conduit Scott à sa niche, une case de bois branlante posée au milieu d'un paysage aride aux cactées de carton-pâte.
La cabane est décorée de planches photographiques.  Scott les interroge, cherchant à situer dans sa mémoire défaillante où il a rencontré ces visages désuets et jaunis.  Un colporteur de livres s'y serre contre une jeune femme à l'abondante chevelure.  La même femme en robe blanche tend l'index à un gros homme en tablier dont la main repose sur la poignée d'un tranchoir pendu à sa ceinture.  Le colporteur revêtu d'une robe noire peigne sa barbe rousse; par la fenêtre, dans son dos, on aperçoit un troupeau de jeunes gens alignés devant des billots.  Une tatoueuse dessine sur l'épaule de la femme la septième étoile, symbole du commandement suprême.  La femme, dont la tête est maintenant cagoulée élève ses mains en coupe.
Par les interstices du bois, Scott jette un oeil dans la pièce adjacente.  Il n'a que le temps de distinguer une grosse pelote d'épingles d'où émerge une petite tête aux yeux globuleux, un monstre, un mutant.  Un Dresseur surgit et le rappelle à l'ordre par une décharge dans les mollets.  Le chien automatique aboie, menaçant.

Dans la cabane du zoo, Scott fait sans cesse les mêmes cauchemarde.  Transporté des siècles en arrière, il se voit entouré d'une 'famille".  Trois rêves qui reviennent en boucle l'obsèdent:
- sa "mère' veut le soigner parce qu'il a pissé au lit.  Elle le poursuit avec une grande seringue en forme de clystère; toute la maisonnée lui recommande d'être obéissant et de se laisser faire.
      - sa "mère" essaye de faire rentrer son "père' dans un four crématoire (elle n'est pas contente, elle sue à grosses gouttes parce qu'elle n'arrive pas à fermer hermétiquement la porte.


- il vient de naître.  A travers les cuisses écartées de sa "mère', il voit pointer la tête d'un deuxième enfant, sans doute son jumeau.  Le foetus tombe dans une cuvette sous l'accouchée.  Le chirurgien jette le deuxième bébé à la poubelle.

Le matin, les Dresseurs viennent chercher les bêtes et les mènent à leur parc de démonstration.


Le caveau et la traite


Cette distraction, qui contrevient aux lois fondamentales, n'est accessible qu'aux administratrices de haut rang.  Dans leur jargon, les animaux appellent ça 'aller en bière' au "descendre au caveau’'.  Les démonstrateurs sont couchés entre deux planches de bois si rapprochées qu'il n'ont pu s'y glisser qu'on rampant, supportant tant bien que mal le frottement des échardes du sol mal équarri.  Le plancher supérieur est troué d'ouvertures circulaires qui ne laissent passer que la queue, si bien qu'en entrant au bordel, les femmes ont la vision d'un véritable champs de bites.  Couché à plat dos, et incapable de remuer de plus d'un centimètre vers le haut, Scott a glissé dans l'ouverture son sexe mou.  Une main qu'il ne voit pas, dont il sent seulement les ongles acérés se planter sans précaution dans son bout de viande, l'introduit dans le tuyau de la trayeuse pour opérer le dégorgement.  L'appareil exerce un massage et une succion continue, pareille à celle d'un puissant aspirateur.  La machine ne distingue pas les épisodes de flacidité d'après éjaculation.  Elle continue à pomper sans relâche jusqu'aux premier sang.  Les bites violacées et inoffensives sont ensuite désinfectées.  Une bougie de gros diamètre enduite d'un gel spermicide est enfoncée dans l'urètre où elle séjourne une bonne heure, agitée régulièrement par les mains des vétérinaires invisibles.  Les plaintes qui gagnent de proche en proche avertissent Scott qu'il se passe autrechose.  Il n'est libéré de la bougie que pour sentir l'aiguille d'une seringue hypodermique se ficher dans sa bite.  Après une violente brûlure, la cocaïne injectée directement dans son dard remonte vers le coeur et le cerveau, déterminant un apaisement momentané en même temps qu'un priapisme constant.  Durant les douze heures qui suivent, son boute-feu est utilisé sans répit, lustré par les sécrétions vaginales des délinquantes qui ne peuvent s'empêcher de rôtir le balais, se traînant d'un vit à l'autre et sautant à l'envi sur les pafs anonymes.  Les instruments toujours verts sont nettoyés par des frictions à l'alcool et des frottements d'herbes urticantes, dont le contact crée de petites vésicules chaudes, reliefs agréables aux vagins élargis.

                Couché entre les planches, dans l'atmosphère raréfiée du tombeau, les voisins d'office se parlent en chuchotant, indifférents aux mouvements des matrones qui les font reluire.  Le plus proche de Scott est attaché par la taille car ses bras sont sectionnés, l'un à l'épaule, l'autre au coude, et il ne possède plus qu'une demi-jambe.
- Qui t'a fait ça? demande Scott.
- Je faisais partie des mâles de combats.  Tous les amputés dont les mutilations ne sont pas symétriques ont été blessés dans l'arène.  Bientôt je n'aurai plus de jambe.  On me coupera les couilles, mon service sera fini et je serai revendu comme tronc de compagnie aux danseuses.  Alors ma retraite sera douce, ma maîtresse comblera tous mes caprices.  Les vétérans des arènes sont privilégiés.  Ils ne finissent pas au magasin à viande.
- Je sais ce que c'est, dit Scott, j'en viens.

              La curée

                Réunis dans la porcherie, les animaux se traînent à genoux dans la boue mêlée de paille.  De grands numéros ont été dessinés à la peinture sur leur dos.  Les auges sont remplies d'un brouet noir où surnagent des morceaux de viande dure, fibreuse, et des fragments d'abats.  Scott croit reconnaître dans les bribes rosacées qui flottent dans sa soupe, des testicules coupés en quatre.  La viande mal cuite croque sous la dent.  Selon qu'ils marquent de l'appétit ou du dégoût, les citoyennes jettent aux animaux des sachets de nourriture synthétique ou des jetons portant le numéro des cochons trop délicats.  Les Dresseurs leur donnent le nombre de coups de corde à noeuds correspondant.  Les bêtes rendues folles ou violentes, celles qui ont attenté à leur vie, sont isolées deux par deux dans des boxes de barbelés.  On ne leur sert plus la soupe.  L'un est immobilisé dans un carcan ' L'autre, pour survivre, n'a qu'à le dévorer tout vif. il meurt souvent avant son casse-croûte à cause de l'ingestion de nourriture infectée.




Les jeux


Le jeu permet aux citoyennes d'éprouver toute la gamme des sentiments empathiques.  Il possède une valeur politique sans égale, démontrant que l'homme est naturellement agressif et violent, et son maintien à l'état de bête l'unique moyen d'entretenir une sécurité durable.

La courre: Les portes du corral s'ouvrent, libérant l'homme peint en noir, aux couilles gainées de sacs de cuir lestés qui entravent son déplacement.  Un masque à cornes lui recouvre entièrement la tête.  Son partenaire ne dispose que d'une corde avec laquelle il doit lui lier les quatre pattes avant de lui écraser la tête dans le sable.  Les femmes des tribunes enfoncent le visage de leurs eunuques entre leurs cuisses, cravachant la croupe du lécheur pour qu'il fouille plus profondément l'entrejambe.  Elles jettent dans l'arène des flèches d'acier empannées de fleurs en papier.  Le vainqueur choisit deux des harpons fleuris dont il a esquivé la chute et pique ces banderilles dans le cul du vaincu avec le geste du lanceur de javelot.  Les K-pitaliennes réclament les oreilles.  Il les découpe et les jette à la volée dans le public.  Puis, armé d'une hache il tranche un segment de membre pour marquer sa victoire.  Les vétérinaires cautérisent au feu la partie mutilée.

La luche: deux adversaires de force et de corpulence égales pénètrent dans le cirque.  Les combattants disposent de jarres d'huile pour se lubrifier les bras et les mains.  Les coups bas sont recommandés, notamment la torsion des organes saillants et leur arrachage par étirement ou morsure.  Dans la première partie du combat les compétiteurs tentent de s'introduire dans tous les orifices de l'adversaire, les oreilles pour crever le tympan , les yeux pour aveugler, le nez ou la bouche pour asphyxier.  Le plus vaillant trace un cercle dans le sable, au milieu duquel il place son adversaire estourbi, en équilibre sur les épaules.  Maintenant entre ses genoux l'abdomen du perdant, il lui verse de l'huile dans l'anus avant d'y plonger la main.  Poing ouvert à l'intérieur, il effectue de puissants mouvements de piston vers le bas.  Saisissant ce qu'il peut des viscères, il le vide comme on prépare une volaille.

Le reug: ainsi appelé à cause de l'onomatopée qu'aboient les vainqueurs, le Reug est un jeu d'équipe.  Les joueurs portent des épaulettes garnies de pointes et des pelotes d'épingles nouées en bracelet autour des genoux qui servent à piquer la balle, une tête fraîchement coupée.  Toute tête perdue entraîne une mêlée sous laquelle volent allégrement les coups de genoux.  Les équipiers, se poussant entre eux se blessent les uns les autres.  Le sang issu des piqûres ruisselle dans le sillon dorsal, strie les culs de taches brillantes et s'accroche en gouttelettes aux poils des cuisses des joueurs.  Les plaquages tracent des estafilades parallèles, des damiers et des dièses.  Les joueurs rivalisent d'habileté pour arrêter les adversaires dans leur course en passant le doigts dans leurs anneaux de nombril ou de gland, déchirant les chairs lors des chocs violents.  Celui qui parvient à porter la tête dans l'en-but place sa queue dans la bouche du ballon.  Mais l'essai n'est marqué que s'il s'acquitte du devoir d'enculer un joueur qu'il choisit dans l'équipe adverse et que ses coéquipiers lui apportent en criant "Reug, reug, reug".
                   Les vaincus qui n'ont pas la chance de mourir sur le stade sont conduits au jardin et assis sur des
planches de bois percées sous lesquelles poussent de jeunes bambous qu'arrosent quotidiennement les visiteuses.  La croissance rapide des tiges taillées en biseau les empalent lentement, jusqu'à ce que cherchant la lumière, elles trouvent une issue par le ventre ou le côté.


                Scott, vainqueur des trois jeux (le dernier par la marque exceptionnelle de six enculades à zéro), a été ramené au musée et promu démonstrateur-vedette.


Le marteau-pilon


Pudiquement dénommé "inducteur de pédication", le marteau-pilon, inventé pendant la deuxième guerre sexuelle, fut à la révolution féminine ce que la guillotine fut aux révolutions politiques.  Porté par un trépied solide, ce cheval de bois à selle articulée s'élève au centre d'une cage de verre.  A son sommet se trouve un piston pneumatique où est enchâssé un sabot de bois amovible, remplaçable par diverses sortes de cônes et de pyramides aux arêtes plus ou moins acérées.  On y emmanche pour la visite quelques uns des précieux godes de la collection.  Les Dresseurs qui veillent au bon déroulement de la représentation règlent l'appareil sur la cadence basse, baignent le siège du démonstrateur, lestent ses chevilles et ses poignets de sacs de sable et de boulets.  Quand ses fesses posent enfin sur la selle, les dresseurs, à l'instigation des visiteuses, jouent avec le tableau de commande, accélèrent la cadence du piston, le font vibrer ou tourner sur lui-même comme une toupie.  Le corps du cheval articulé s'agite comme un taureau mécanique, les jambes de Scott volent, décrivant des ellipses qui achèvent de lui distordre l'intérieur.  Mais il endure la torture avec résignation, car, dans les salles voisines, d'autres "modèles" démontrent les instruments de chirurgie et de question, le vilebrequin, les brodequins, la scie circulaire ou la machine à laver.  Son aptitude à monter le cheval mécanique soulève des vagues d'enthousiasme.

Devant l'écran de contrôle de son boudoir, la Conservatrice observe le déroulement du rodéo.  Elle écarte d'un coup de pied le chien qui la flatte et dit à sa suivante:
- Regardez-les.  Pour un peu elles applaudiraient.  Bientôt elles voudront connaître son nom et se déchireront pour le posséder.  Il est urgent de l'envoyer au xystarque.





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Hôpital central, ce jour.



- La greffe n'a pas pris sur l'ordinaton, professeur.
- Que pouvait-on tenter de mieux avec un bout de cerveau végétatif et ce sexe inutile?
Une masse de tuyaux reliés à un système sanguin artificiel commandé par computer occupe le centre du laboratoire.
- Le matériel traverse des phases paradoxales hallucinatoires.  C'est inhabituel, mais il semble que le sujet soit porteur d'un virus qui attente au bon fonctionnement de la machine.  Quelque chose de vivant dans les circuits affole les contrôles.

- Pourquoi le pénis entre-t-il en érection?  Il remue, professeur.

- Si vous pensez que les relais électroniques peuvent éprouver du plaisir, vous n'avez qu'à tenter l'expérience, Mlle Krup.
La laborantine écarte les pans de sa blouse blanche.  S'ouvrant la chatte avec ses doigts aux ongles peints elle se place, cuisses écartées au-dessus de la tête du noeud frétillant et se l'enfonce dans le con après quelques contractions vaginales.  Le Vivisecteur ne prête guère attention à l'affolement des diodes; d'un doigt joueur, il chatouille l'anus resserré de la jeune femme qui murmure "Oh professeur!" quand le gland du scientifique force la porte arrière.
- Oui, dirait-on pas qu'elle est vivante, je la sens raide à travers votre paroi vaginale, sa tête cogne contre ma queue.  Ah, Mlle Krup, voilà ce que j'appelle de la recherche en profondeur.

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Scott ou ce qu'il en reste, est étendu sur le lit de conservation.  Un trou a été percé dans sa gorge pour permettre la pose du respirateur en plastique.  Ses fonctions vitales sont entretenues par l'appareillage complexe auquel il est relié par des bouquets de tubes et de valves.  Son sang est épuré, recyclé en permanence, il est nourri par intraveineuse. Le coma dans lequel il est plongé n'a pas mis fin au fonctionnement à vide de la matière, mouvement organique minimal, producteur d'une vie secondaire effilochée en semi-rêves.
Les parties non essentielles ont été retranchées les premières; les oreilles confites dans le miel, les organes génitaux pochés dans l'ersatz-milk, la langue, le nez.  Le conditionneur peut attaquer à la scie l'articulation d'une cheville, le corps demeure inerte malgré la progression de la lame dans l'os.  Bientôt, sous la veilleuse violette des ateliers de coupe de la N.A.D.A., commenceront sur le vif les opérations de salage et de fumage des jambons et des gigots.

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- Je ne comprends pas comment il fonctionne encore.  Il faut l'arrêter.
- Il se débat, et l'injection létale risque de le plonger dans une phase encore plus douloureuse et agitée.
- Pas pour longtemps.
- Et si les quinze minutes durant lesquelles son cerveau continuera à délirer lui permettent d'atteindre le centre de commandement.
- Alors nous le verrons pénétrer dans cette pièce, et puis poum! comme des mouches, nous serons volatilisés sans nous en rendre compte.

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L'avocat soulève le paquet de fiches attaché au caisson de survie.  Il lit le nom "René Truscott".  Il examine le visage du patient enfermé dans le poumon d'acier qui dort paisiblement du sommeil de Blanche-neige.  Il consulte furtivement sa montre et dit:
- Je ne vois pas ce que je peux faire pour vous.
- Il est entré pour une banale ablation de la prostate.  L'intervention s'est déroulée sans problème, mais il a fait un accident lié à l'anesthésie.
- Comment se fait-il que vous n'ayez pas réglé ça au bloc?
- Il avait des chances de se réveiller ...
- Quelle était sa profession?
- Commerçant, d'un genre particulier, gérant de sex-shop.  Il a fait parler de lui autrefois pour une affaire de moeurs survenue dans un commissariat où il aurait tourné un film, comment dire?.. leste.
- Je vois. Personne ne vous le réclamera. Que craignez-vous?
-  Sa femme s'oppose à ce qu'on le débranche.  Elle menace d'attaquer.
- Elle perdra.
- C'est qu'il y avait un dessous de table.
- Il faut rendre l'argent.  Nous allons proposer de doubler ou tripler la somme.  Je vais tenter de m'entendre avec les assurances...
- Il était assez délabré de toute façon.  Plusieurs hépatites, deux cancers, diverses maladies vénériennes mal
soignées.
- Ne vous inquiétez pas, même si nous allons en justice, le profit que vous tirerez de la vacance de la place couvrira largement les frais.  Et puis, elle en a pour dix ans de procédure.
- Je préférerais que nous discutions de ça dans mon bureau.  Il vaut mieux rester discret à côté des moribonds.  Certains entendent peut-être.
- Superstition...

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Le restaurateur m'attend dans sa niche.  J'ai pipé les Dresseurs pour qu'ils me sortent de l'enclos.  Je leur ai offert les paquets de nourriture synthétique que j'ai gagnés aux jeux pour qu'ils me laissent sortir du dortoir.  En rampant le long de la colonne d'aération j'ai rejoint le sous-sol du M.A.T.E.U.R. Les mains du vieil eunuque tremblent en effleurant mon corps, il lèche les anneaux de mes tétons durcis, fait tourner l'ampallang serti de diamants que la Conservatrice a fait poser à travers mon gland, fait vibrer le diapason de l'oenang, le vaste cercle de forclosion qui orne ma queue et par lequel les Dresseurs me tiennent en laisse.  Le restaurateur ne peut pas jouir par devant et l'oenang m'empêche de le réjouir par derrière.  Il me caresse et me contemple.  Avec de la cire il construit de petites figurines à ma ressemblance.  Il épie les bruits du couloir, tremblant à l'idée qu'on nous surprenne dans l'exercice d'une activité interdite.  Il grave les contours de ma bite sur des tablettes de pâte à modeler, trace au charbon des silhouettes de moi sur ses murs qu'il efface les unes après les autres.  A genoux, bouche-bée, il me demande de me branler au-dessus de son visage, et, en bon chien, lèche le foutre que je répands sur le sol.  Je lui intime de tenir sa promesse et de me mener au Livre sans quoi je le dénonce pour avoir fait de l'art.  Il me donne le plan du labyrinthe gravé dans le plastique d'une carte magnétique.  Il tient à m'embrasser avant que je me risque dans le couloir.
Une étoile dorée est peinte sur la porte.  Scott introduit la carte dans la serrure magnétique.  Avant qu'il ait le temps de comprendre qu'il est de retour dans l'androcée, deux Dresseurs l'ont saisi par les bras.  Ils le traînent sur la piste de terre battue.  Au loin se dresse une tente de campagne dont les montants sont des Dresseurs au garde-à-vous qui supportent la tension de la toile-camouflage par des chaînes attachées à leur Prince Albert.  Il fait sombre et frais à l'intérieur.  Les meubles sont des esclaves à croupetons, maintenus en place par des pommeaux d'épée fichés en terre sur lesquels on les a assis et que des pointes de sabre sous le ventre empêchent de s'avachir par trop.  C'est sur ce trône que siège le xystarque, coiffé d'une casquette blanche.  Scott, jeté à plat ventre dans la niche, lève les yeux sur le colosse vêtu d'une cartouchière et d'un flingue qui disparaissent dans le manteau de fourrure que lui font ses poils.  Seul entre les animaux du zoo, il échappe à la tonte.  Naturellement chauve, il est atteint d'hypertrichose, si bien qu'il semble qu'un vêtement de laine noire ait été jeté sur ses épaules.  Le pelage soyeux s'échappe en volutes de sa raie culière, boucle le long de ses cuisses, cache la flamme tatouée répandue sur sa poitrine. Il est tri-orchide, mais ses organes sont noyés dans une gerbe de poils pubiens tressés en droadlocks.  A ses pieds quatre Dresseurs entremêlant leurs jambes sont couchés en étoile.  Réunis, leurs sexes dressés ont été liés avec des élastiques comme une botte d'asperges.  D'une voix de basse qui monte des couilles, le xystarque, désignant le faisceau de queues, dit:
- Tu es le démonstrateur du marteau-pilon; je t'ai fait préparer un siège à la hauteur de tes compétences.
Scott s'installe sur le bouquet bourgeonnant.  Se penchant à droite puis à gauche il cherche à pallier l'inconfort de la chaise et glisse lentement sur la botte.  Le xystarque observe avec intérêt la descente, peignant de la main gauche le crin qui cascade sous ses burnes:
- Je suis Rex, le chef des Dresseurs.  Nous avions rendez-vous.
- Je m'attendais à quelque-chose de cet ordre.

- Ton habileté et ton acharnement à survivre indisposent les gouvernantes.
- Je l'ai fait pour arriver jusqu'à vous.
- Tu mens.  Je sens l'odeur de ta peur.  J'ai appris à la reconnaître.  Il n'est pas de meilleur confesseur que l'exécuteur.  Le barbier et le bourreau figurent tête-bêche sur la même carte, ils tirent le même profit du suif humain.  Ce que le chirurgien faisait pour l'amour de la science, j'étais le dernier à jouir du droit de le faire par amour de l'art.  Mais il n'y a plus de place pour cela.  Protégé par l'anonymat, n'importe qui peut appuyer sur le bouton.  C'est là le triomphe du progrès, la restauration de la justice immanente, l'asphyxie, les radiations, l'épidémie pour tous.  Les Danseuses prolongent la danse macabre et proclament l'égalité de tous devant l'auto-destruction.  Non, vraiment, je n'ai plus le coeur à l'ouvrage.
Le xystarque s'accroupit devant Scott et lui roule une longue pelle, bave dans sa bouche en y agitant la langue.
- Que je lève ou non la main sur toi je suis condamné d'avance.
Scott s'accroche aux soies piquantes de la poitrine de Rex, les tord, y fait des noeuds, les arrache.  Le xystarque le soulève de son siège, le prend dans ses bras.  Scott glisse jusqu'à la hampe velue de la bite de Rex et l'avale.  En manipulant les trois couilles, il lit sur la peau "Robinet d'amour, et trois balloches".  Rex le repousse du pied.
- Assez.  Prends les ciseaux et taille-moi les poils du cul.
Rex se retourne et se campe dans la position du gardien de but qui attend de la visite.

- Il y a dans la salle des godes un cabinet noir où se trouve ce que tu cherches.  Le seul moyen pour toi d'y
pénétrer, c'est de t'emparer de mon greffon.  Il t'ouvrira la porte et tu pourras monter dans la tour.  Alors graisse
toi les mains et cherche l'emplacement de l'implant.
- C'est toujours toi qui donne les ordres.
- Ça ne changera jamais.  Allons, plus vite nom de dieu!
Scott regarde avec émotion le triangle de poils au bas du dos et les vagues frissonnantes des épaules.  Sa main en pointe se fraye un chemin, baguée par le sphincter serré.
- Dépêche-toi, tu m'agaces.

Rex a posé le menton sur le dos de son trône, il s'est agrippé aux jambes de deux Dresseurs venus en renforcer les montants.  Malgré cela, il fait un bond sous la poussée.  Il saisit l'avant-bras de Scott, rectifie la position, le fait coulisser avec un sanglot étranglé.
- Je sens la boule.
- Donnez-lui un poignard ... Rate pas ton coup surtout.  J'espère que quand je serai mort tu te feras un collier avec mes tripes.
- Nous avons assez souffert.
Scott saisit le pistolet dans le baudrier de Rex, retire sa main, plonge le canon dans le rectum du xystarque, tire deux fois.  Il incise et récupère la bille rouge.  Indécis, il la regarde rouler dans sa paume.  Un Dresseur lui fait signe de l'avaler.







La porte coulissante du cabinet noir s'est refermée silencieusement sur Scott.  La petite pièce exiguë abrite une seule vitrine étroite faiblement éclairée.  Scott casse du poing la vitre et saisit le livre qui repose à l'intérieur.  Il l'ouvre et parcourt la table des matières.  Il lit:

1. Le joueur choisit une cartouche.
2. Scott va au cinéma.
3. Il se marie, le vin coule à flots, mais son bonheur est de courte durée.
4. Scott passe le week-end à la campagne.
5. Il lit les journaux et constate que tout ne va pas pour le mieux
6. Comme il en rêvait, Scott est engagé comme figurant dans un film.
7. Avec son cachet. il voudrait acheter pour ses proches un caveau décent dans un cimetière chic.

Il veut feuilleter le volume mais les pages volent en poussière.  Il ne lui reste qu'un fragment de la reliure entre les mains.  L'ampoule de la vitrine explose dans un bruit sec.
L'écoulement du flux reprend.  Quelqu'un a rallumé la lumière.  Les parois du réduit sont translucides.  Il fait chaud.  Scott est aveuglé par le chatoiement des projecteurs que reflètent les murs de verre de sa cage et les miroirs rotatifs du dôme.  Le plancher aussi a cessé d'être opaque, mais les flashs des néons clignotants, formant des spirales au déroulement hypnotique, lui masquent la vue.  Les basses profondes d'une musique lointaine mais assourdissante font vibrer le verre au rythme de son coeur qui s'accélère.  Les nappes superposées s'enroulent comme autant de pellicules cotonneuses déchirées par les scansions des batteries qui s'impriment dans le ventre, s'emparent des terminaisons nerveuses, déclenchent des tremblements incontrôlés et incohérents, dont la répétition harmonise des chorégraphies aléatoires.
Maintenant, Scott devine sous ses pieds, dans le hall circulaire du planetarium, la foule resserrée aux bouches béantes, frappée d'hébétude par les drogues extatiques, ces milliers de têtes, de bras levés qui déferlent et refluent, se répandent et se dissolvent en rondes tourbillonnantes de derviches, ballottés par leur vide intérieur, roulant sur des planchers de dos disloqués qui charpentent un espace sans cesse renouvelé et éphémère.  Saisi par la violence de la transe, Scott lui-même entame un mouvement de toupie.  En bas, les desservantes sautillent sur des tapis de braises et leurs cris aigus se mélangent à la partition électronique qui répète en boucle son message codé:  ‘'Ne pensez pas, dansez".  Les première danseuses renversées par l'épuisement s'effondrent.  Le gros de la troupe, sourde aux craquements des os qu'elle brise, les piétine et les martèle dans son hystérie collective.  Des pétales de fleurs pleuvent du plafond tandis que se séparent les hémisphères formant le dôme et qu'apparaît dans l'ouverture le ciel nocturne où brille le globe de la pleine lune.  Les danseuses apaisées entonnent la litanie:

Ordinatrice de la musique
Conservatrice des mots
                Colonisatrice des mondes récurrents
Ea qui condamne et soulage
Tombeau des planètes
Gouffre des étoiles
Génitrice hypertrophiée
Forêt primale
Féconde et putride
Unité mutilante
Où se résorbe l'être ...

Un bourdonnement agite le réceptacle de verre.  Scott ressent dans son ventre la poussée de l'accélération.  Il se pisse dessus tant la vitesse est grande.  Il lutte pour ne pas perdre conscience.  Il devine les formes assises dans l'antichambre.  L'image est flottante comme projetée sur un écran de toile exposé au grand vent.  Par moments le point se fait et les silhouettes se précisent: deux femmes accolées par l'épaule et le bassin, qui n'ont ensemble que deux bras et trois jambes.  Un mutant agenouillé devant elles a fiché ses moignons dans leur sexe.  Il ressemble à un marionnettiste qui agiterait des poupées muettes.  Scott entend pourtant le dialogue qu'elles échangent avec une boule d'épingles en lévitation par-dessus leur tête.  Leurs phrases se répètent en cascades ternaires, comme un parfait écho:
- Nous consolons.
- Nous réparons.
- Nous répétons ce que complotent les morts.
- Notre réunion peut mettre fin au règne des apparences.
- Réunies, nous sommes Elle, répètent les voix en canon.
Scott sent des picotements dans son sexe.  Tout son corps le démange.  Il tâte ses poignets qui enflent.  Il s'alourdit, prend de la masse.  Une douleur déchirante lui paralyse le bas-ventre.  Il s'arc-boute, porte les mains à son entrejambe.  Son pénis a doublé de volume.  Il continue à grandir et à enfler.  Sa queue atteint bientôt la longueur de ses jambes.  Il se penche en arrière pour garder l'équilibre, mais l'expansion continue de sa bite le soulève comme un insecte accroché à un ballon.
Scott se sent écrasé par la hauteur de l'idole de pierre.  Il aperçoit à peine son menton, tout là-haut.  Ses mains reposent sur deux lunes brillantes où courent des étincelles bleues.  L'espace d'un instant, il entrevoit une forme à l'intérieur de la statue dont la carapace électronique se lézarde, une vieillarde ridée aux longs cheveux blancs tachés de henné.



                Invocation de Scott à l'Idole

Tu as mis ta robe du soir pour aller danser avec les officiers du corps de garde.
Je suis venu pour que cesse cette étreinte.

Tu es parée de perles scintillantes comme une nuit d'été traversée par la brise
Qui soulève tes jupes.

Pour me punir je bourrerai de coups de pieds ton ventre enceint,
Car je hais que tu sois mon lit et mon repos.

Je résiste aux constellations qui enflamment tes entrailles et aux nuées de gaz qui veulent m'expulser.
Je régresse, je me malforme, j'adopte le sexe incertain de ta satisfaction.


La statue penche la tête.  Le faisceau tombé de ses yeux ardents l'éblouit.  Elle tend vers Scott sa main de marbre froid, le saisit par la queue et l'élève.  Les deux lèvres gigantesques grossissent démesurément par-dessus sa tête.  L'énorme fruit le gobe, se referme comme la coquille d'un bivalve.  Des vagues de sécrétions déferlent; noyé, il respire encore.  Son sexe s'allonge et s'affine, se transforme en un long cordon qui s'enroule autour de son cou.  Il se boursoufle, sa tête se déforme et éclate, projetant des paquets de magma et d'écume, éjaculant les germes de nouvelles voies lactées.



                En bas de l'écran, en lettres jaunes clignote le signal: "Avant la fin du compte à rebours, tapez « Entrée » pour essayer encore".


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Ce livre contient des samples non signalés comme tels de Michel Ehrlich, Valentine de Saint-Point, Apollinaire, Joe Orton, Albert Londres, Michel Hanuin, Victor Veau, V. G. Viaud-Bruant, D.A.F. Sade, journaux nationaux et régionaux divers.
Le traducteur remercie G. Flaubert, P. K. Dick, A. Jarry, S. Chevy, M. Drexel, A. Rees, Nounours,
J. W. Bobbit, J. J. Pauvert, ainsi que les nombreux anonymes qui ont collaboré à leur corps défendant à la constitution de cet ouvrage.

S. O’Hara, R. Succo, J. Dahmer, R.I.P.

Ce livre est dédié aux pourfendeurs des censeurs et aux assassins des tyrans.

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