AU
RENDEZ-VOUS DES ORPHELINS
farce
policière
1988
ACTE
PREMIER
Au
lever du rideau on découvre un appartement meublé, assez sombre,
mal éclairé par de petites lucarnes en hauteur. Côté cour,
derrière un rideau à fleurs on aperçoit un évier. Bruits de
plats, Harold termine la vaisselle. Au centre de la scène, la porte
de appartement donne sur l'escalier, côté jardin une autre porte
ouvre sur la chambre. A l'avant-scène, sous une fausse fenêtre, se
trouve une table sur une estrade, entourée de banquettes; l'ensemble
reproduit un box d'une salle-à-manger de pullman.
Des
pas dans d'escalier; Harold un tablier blanc noué autour de la
taille, se précipite, assiettes et couverts en main, vers la table à
moitié dressée, il pousse ses vêtements restés en boule sur la
banquette. Maxime entre en uniforme de gardien de la paix, la
casquette inclinée sur l’œil droit.
HAROLD
: Alors grand frère, combien de meurtres aujourd'hui?
MAXIME
: La routine, la routine désespérante, juste une petite explosion
au gaz, suicide raté sans doute, les gens sont tellement négligents.
HAROLD
: Et c'est tout ?
MAXIME
: Je ne risquais pas de rapporter de nouvelles passionnantes, j'ai
fait le planton tout l'après-midi devant le commissariat.
HAROLD
: Même pas un petit crime ingénieux ?
MAXIME
: Pas que je sache, les criminels manquent cruellement d’imagination
ces derniers temps.
HAROLD :
Mais la police en a pour deux quand ils sont à court d'idées.
MAXIME :
Eh bien non, vraiment rien, le public restera sur sa faim ce soir ;
pas de contes pour s'endormir.
HAROLD
: Pourtant tout à l'heure à la radio, entre les promotions de la
semaine et le résultat des courses, j'ai cru entendre un fait divers
prometteur, et dans ton secteur en plus, pas loin d'ici.
Je
me disais que tu saurais quelque chose : une fille qui a trucidé son
client et prévenu elle-même la police, arrêt cardiaque qu'elle
disait ! mais quand tes collègues sont arrivés sur les lieux, ils
ont retrouvé la demoiselle refroidie. Surprenant, non?
MAXIME :
Se faire justice soi-même. comme si les forces de l'ordre n'étaient
pas là pour ça ! On nous gâche le métier: quel manque de
respect vraiment de la vie humaine et des commandements de l'église
!
HAROLD
: Mais non, et c'est là que l'affaire devient mystérieuse : la
meurtrière ne peut pas s'être suicidée.
MAXIME :.
Comment peut-on en être si sûr ?
HAROLD
: Étranglée parait-il. Il faudrait une sacrée force de caractère
pour y arriver seul !
MAXIME :
Et la radio en savait déjà si long sur cette affaire ? Nous serons
donc toujours les derniers informés ! On devrait poursuivre en
justice tous ces journalistes indiscrets qui incitent à la
délinquance par leurs récits rocambolesques. D'ailleurs Je trouve
ton intérêt pour les crimes de sang malsain, nauséabond. Tu es
grand maintenant Harold... Tu devrais t'occuper plus sérieusement de
tes études au lieu de lire les feuilles à scandale et de colporter
des ragots... Le dîner est prêt ?
Il
s'assoit, jambes étendues sous la table, lance sa casquette vers le
porte-manteau. Pendant qu'Harold la ramasse pour la pendre, Maxime
fouille rapidement les poches du veston.
HAROLD
: Tout est prêt, mais c'est un repas froid, je n'ai pas vraiment eu
le temps de me mettre en cuisine.
MAXIME
:
Quel dommage ! et moi qui ai invité l'inspecteur
Schneider
en lui vantant tes talents de cordon bleu. Je dois l'accompagner
cette nuit pour une longue planque. Ce n'est pas un honneur accordé
à
n'importe qui. Mais
il m'aime
bien Schneider,
c'est bon pour ma carrière, et on en apprend plus en une nuit avec
lui qu'en une année
d'école
;
une intelligence
remarquable, un flair proverbial... Quelle joie d’obéir
quand le chef a la stature de l'inspecteur
Schneider.
HAROLD
: Peut-être sait-il quelque chose, lui, sur l'affaire en question ?
MAXIME
: Ah non, Harold ! pas un mot ! je ne veux pas qu'il
apprenne qu'il m'arrive de te parler de mon travail. La dissimulation
est une qualité essentielle dans notre profession ; comme les
médecins et les prêtres, nous sommes tenus au secret... Mais toi
qu'as-tu fait pour être tellement occupé ? Allons. au rapport,
jeune homme !
HAROLD :
Rien, tu sais bien, ça ne se voit pas ; le travail de tous les
jours, le ménage, les courses, la vaisselle.
MAXIME
: La vaisselle est encore humide et il y a de la poussière sur le
dossier des banquettes. Attention Harold ! pas de mensonges !
HAROLD :
Je suis allé faire mettre des fers à mes chaussures, tiens, écoute,
maintenant elles font le même bruit que les tiennes. Je suis allé
chercher ton uniforme de cérémonie chez le teinturier, impeccable
plus une tache sur les poignets ni sur la braguette. Et puis les
courses, ça prend du temps.
MAXIME
: Alors, tu as encore passé l'après-midi à traîner. Pendant que
je me saigne aux quatre veines pour payer tes études, Monsieur se
promène ! Ce n'est pas en arpentant le pavé pour faire le joli
cœur que tu arriveras à quelque chose dans la vie. De l'ordre, du
sérieux, ne jamais sortir du droit chemin.. Tu ne réponds rien ?
Silence gêné. Maxime se lève.
Comment
s'appelle-t-elle ?.. Inutile d'essayer de me tromper, le le vois
à ton sourire. Tu devrais passer aux aveux avant que je me mette
vraiment très en colère. Tu m'entends Harold ?
Il
défait sa ceinture, l'enroule sur sa main droite, la fait claquer à
terre.
Tu
devrais le savoir depuis le temps ! Tu peux faire ce que tu
veux, sauf me mentir. C'est pour ton bien ; j'ai toujours su te
conseiller et te défendre.
HAROLD !
Je m'excuse Maxime. Je te demande pardon, je n'ai jamais eu de
secrets pour toi.
Il
tombe à genoux.
MAXIME :
Alors son nom ? son adresse ? Et que font ses parents ?
HAROLD :
Je ne sais pas.
Maxime
lui donne un coup de ceinture.
MAXIME
: Méchant garçon ! elle s'appelle Catherine, le numéro pour
la joindre est dans la poche de ton veston.
HAROLD
: Tu as fouillé mes poches ?
MAXIME :
Vérification de routine ! Ne détourne pas la conversation !
HAROLD
: Je l'ai rencontrée en faisant les soldes. Dans la cohue elle m'a
crié « C'est ça. Bousculez-moi ! », j'ai répondu
« avec plaisir » : c'est merveilleux le hasard !
On
frappe à la porte.
MAXIME
(hurlant): Entrez !
Entre
Schneider. Il reste perplexe un instant. Toussotements gênés de
part et d'autre. Maxime remet sa ceinture, Harold se relève, chasse
de de son tablier des poussières inexistantes.
SCHNEIDER :
Je vous dérange peut-être ?
MAXIME
: Non Inspecteur, juste une petite affaire de famille à régler.
Harold, mon frère, l'inspecteur Schneider, un exemple pour notre
temps, le fleuron de notre corporation.
SCHNEIDER
: Oh fiston, nous avions dit sans cérémonie... Vous ne vous êtes
pas encore changé ? je vous j'avais dit pourtant : je vous veux
en civil cette nuit. Tiens, c'est curieux : vous avez perdu votre
lacet gauche.
MAXIME
: Harold aura oublia de le remplacer.
HAROLD
: Tes chaussures étaient en parfait état quand je les ai cirées ce
matin.
MAXIME
: Tu dois confondre. Je vais me changer.
Il
entre dans la chambre.
HAROLD
: Asseyez-vous Inspecteur. Quel honneur de vous avoir à notre table.
J'admire tellement le métier que vous faites !
SCHNEIDER
: Une charge bien lourde à porter !
HAROLD
: Mais noble !
SCHNEIDER
: En quelque sorte un sacerdoce. Nous sondons les replis tortueux de
l'âme humaine. J'en sais plus aujourd'hui sur les troubles et les
vices de mes contemporains que les romanciers et les psychiatres.
Rien ne remplace l’expérience directe.
MAXIME
(réapparaissant en caleçon): Et quel dommage que vous
n’écriviez pas, le style de vos rapports est d'une si parfaite
clarté !
SCHNEIDER
: Dépêchez-vous de passer une tenue décente, mon garçon. Ce n'est
pas que j'ai quelque chose à reprocher à votre plastique, mais nous
sommes trop pressés pour nous perdre en considérations littéraires.
,
HAROLD
(apportant un plat de viande froide) : Monsieur est servi.
Vous boirez du vin Inspecteur ?
SCHNEIDER
: Non, Jamais avant le service. Appelez-moi Schneider, p'tit gars !
HAROLD
Je n'oserai pas!
SCHNEIDER
: Ce sera plus convivial. Voyez-vous, malgré ma réussite
professionnelle, je regrette aujourd'hui de n'avoir pas de famille,
pas d'enfant pour soutenir mes vieux jours. Vous avez de la chance
d'avoir un frère, et surtout un frère intègre et dévoué comme
Maxime.
HAROLD :
Je sais monsieur Schneider, Max a toujours été mon soutien dans la
vie. Il se battait pour me défendre à l’institution des
Pâquerettes Bleues. C'est comme ça qu'il qu'il est
devenu mon grand frère.
SCHNEIDER
: Comment ça, devenu?
HAROLD
: Eh bien oui, nous sommes orphelins tous les deux.
SCHNEIDER
: Vous voulez dire qu'il n'y a pas de lien de sang entre vous ?
HAROLD
: Pas vraiment, mais c'est tout comme. A l'orphelinat, j'étais le
souffre-douleur des grands. Max n'était pas le premier à m'offrir
sa protection. Tous les caïds des Pâquerettes Bleues
s'étaient offerts avant lui. Je ne comprenais jamais pourquoi cela
tombait sur moi.
SCHNEIDER
(à part) : Peut-on manquer d' imagination à ce point-là ?
(Haut) Oui, Je vois, la promiscuité formatrice des chambrées
de garçons.
HAROLD
: Maxime m'a ouvert les yeux, il m'a montré que ce que les autres
voulaient de moi était mal.
SCHNEIDER
: La vocation de redresseur de tort, le sens moral s'affirmait déjà,
sa voie était toute tracée !
HAROLD
: Max, lui, voulait simplement que je sois de sa famille.
SCHNEIDER
: C'est ce que je vous disais, malheur à l'homme seul! Pas de
société sans famille, nid généreux où l'on apprend à respecter
l’autorité du père.
HAROLD
: Nous n'avons pas de père.
SCHNEIDER
: Pauvres enfants !
HAROLD
: Quand on nous a placés dans des familles différentes, j'ai pensé
mourir. Je voulais m'enfuir pour le rejoindre. Il m'écrivait de n'en
rien faire, qu'il viendrait me chercher dès qu'il exercerait un
métier qui nous permette de vivre. Et le jour de mes dix-huit ans,
il tint parole. Je revivais. Nous avons débarqué à Paris où il
avait été muté. D'abord j'ai eu en horreur cette ville corrompue,
l'étalage outrancier de la luxure, les dangers que Max affrontait
quotidiennement pour me faire une existence confortable.
SCHNEIDER
: Ah mais, Schneider est là, mon garçon, pour protéger votre
frère: Je lui ressemblais un peu quand j'avais son âge ; c'est
émouvant. J'ai de l'affection pour lui. C'est curieux tout de même
ce que vous m'apprenez, car même un œil exercé comme le mien
décèle une vague ressemblance physique entre vous.
RAROLD
: Oui, c'est pour ça que nous nous en tenons à la version
officielle. Vous comprenez ? deux garçons qui vivent ensemble,
cela fait jaser.
SCHNEIDER
: Les gens sont tellement méchants ! Mais à vrai dire, dans cette
maison. cela n'aurait rien d'étonnant.
Maxime
rentre en civil.
MAXIME
: Qu'est-ce qui n'aurait rien d’étonnant ?
SCHNEIDER
: Figurez-vous fiston, que j'ai cru en venant d'être trompé
d'adresse. Vous ne pouvez pas savoir, vous êtes trop jeune et la rue
a changé de nom, mais cette maison que vous habitez était autrefois
d'une réputation douteuse, voyez-vous, volets clos et beaucoup de
passage : une maison à gros numéro, une abbaye de s'offre-à-tous.
HAROLD
: Un claque ?
MAXIME :
Oui, un boxon, je sais. Madame Paméla loue pour pas cher, une femme
charmante, d'une moralité irréprochable. Et puis c'est pittoresque
de retrouver des morceaux du décor d'époque. La table à laquelle
nous sommes assis parait sortie d'un wagon-restaurant ? C'était la
chambre du train, autrefois il y avait tout une mécanique qui
faisait tressauter les banquettes comme dans un vrai compartiment.
HAROLD
: (accentuant la diérèse)« La trépida-ti-on excitante
des trains
Nous
colle des frissons à la base des reins », comme dit le poète !
MAXIME
: Je ne peux malheureusement pas vous faire la démonstration, la
vétusté de l'appareil et quelques essais mouvementés ont eu raison
de la mécanique.
SCHNEIDER
: Ne vous mettez pas en peine, le système m'est familier. C'est
étrange vraiment, je me suis trouvé il y a longtemps assis dans
cette même pièce à cette même table. La vie a plus d'imagination
que nous, elle nous ramène parfois sur les lieux de nos erreurs.
MAXIME
: Vous, Inspecteur, commettre des erreurs ?
SCHNEIDER
: Il faut bien que jeunesse se passe.
MAXIME
: Sentence dangereuse ! Ne dites pas cela devant mon frère, il vous
prendrait au mot. Pas plus tard que tout à l'heure, il essayait de
me cacher qu'il sortait sans autorisation. Et savez-vous pourquoi ?
Pour rencontrer des femmes ! d'où la scène que vous avez
surprise en entrant.
SCHNEIDER
: Oh, ne vous sentes pas tenu à me donner des explications, votre
vie privée vous regarde.
MAXIME
: Un bon citoyen se doit d'avoir une vie irréprochable et peut en
rendre compte à tout moment sans rougir aux autorités...
(regardant Harold) Mais le mensonge, quelle
abomination ! c'est un blasphème. Et ce benêt:, inconscient du
danger auquel il s'expose, s’émerveillait tout à l'heure d'avoir
par hasard glissé un pied dans le piège.
SCHNEIDER
: Tant que ce n'est que le pied ! Mais vous savez, Harold, votre
frère a raison, il faut faire attention.
MAXIME
: On ne sait jamais sur qui on tombe.
SCHNEIDER
: Ça encore, en s'adressant aux services compétents, il y a des
moyens de savoir, mais l'adultère est un acte illégal et
scandaleux. On s'amuse, on ne fait pas attention, et hop ! un
polichinelle dans le tiroir, trois malheureux couverts d'opprobre,
dévorés de remords par le fruit de leur pêché.
HAROLD
: Je ne songeais pas à mal et je suis bien trop conscient du risque,
j'ai tellement souffert d'être orphelin !
MAXIME
: Toi, peut-être ! Mais la perversité des femmes Harold !
tu n'as pas idée, tu ne peux pas comprendre, tu es tellement
innocent. Elles te détourneront du droit chemin par leur séduction
coupable, elles te rendront responsable de leur faiblesse pour te
pousser au mariage, elles voudront te séparer de moi par leurs
mensonges.
HAROLD :
Ah ça, jamais ! Je ne pourrais jamais me séparer de toi une
deuxième fois !
SCHNEIDER
: C'est pourquoi, à bien y réfléchir, les professionnelles
présentent moins de danger que les autres. Pas de chantage au
sentiment, pas d’accident malencontreux, pas de fatigues inutiles
pour conquérir des places fortes qu'on peut prendre dans la
minute... Que voulez-vous, notre métier ne nous permet pas
d'entretenir une vie de famille stable et bourgeoise, nous faisons
face à trop de dangers. Quand on a vingt-cinq ans comme vous Maxime,
c'est parfois une nécessité que de sacrifier à la nature. On se
purge de la misère et du dégoût... et avant la guerre c'était ici
l'une des meilleures maisons de Paris, clientèle raffinée, propreté
souveraine, et excellant dans les spécialités les plus rares. Il
convient de tout savoir des milieux interlopes que notre profession
nous oblige à pénétrer. Comme je vous le disais, l'expérience est
irremplaçable en la matière.
MAXIME
: Ne pourrions-nous pas parler d'autre chose devant mon petit frère
?
HAROLD :
Oh oui, vous savez quelque chose du crime de…
MAXIME
(menaçant) : Harold !
SCHNEIDER
: Mais
non. laissez, c'est normal qu'il s'intéresse ce petit.
MAXIME
Il s'intéresse trop à mon travail et pas assez à ses études.
SCHHEIDER
: A son âge, ce qu'il lut faut c'est entrer dans la vie active, un
travail sérieux, une existence laborieuse et rangée. Pourquoi
n'épouserait-il pas la carrière ? Pas besoin de diplômes pour
le concours; le moins en en sait, le mieux on apprend sur le tas.
MAXIME :
Je ne crois pas qu'il soit très opportun que nous exercions la même
profession. Et puis Harold n'a que dix-neuf ans, Inspecteur.
SCHHEIDER
: Mais justement l'adhésion à un idéal, la fidélité,
l'obéissance sont des qualités propres à la jeunesse. Si j avais
trouvé plus tôt ma voie, ma conscience ne serait pas chargée par
le souvenir de ma coupable inconduite.
MAXIME
: Tu ne souhaites pas te lancer dans la vie active, n'est-ce pas
Harold?
HAROLD :
Je ne me sens pas prêt, le monde extérieur m'attire j'aurais trop
peur de ne pas être à la hauteur. Je suis heureux comme ça avec
Maxime.
SCHNEIDER
: Je vous comprends, fiston, profitez-en bien.
Silence.
Mastications diverses.
Vous
avez vu les manchettes des journaux du soir Maxime ? « Double
meurtre énigmatique ». Les scribouillards croient déjà en
savoir plus que nous. Des témoins auraient vu la victime, la jeune
fille étranglée, vous savez bien ?..
MAXIME
: Non.
SCHNEIDER
: Mais enfin, tout le commissariat ne parlait que de ça cet après-
midi. Vous n'étiez pas 1à ?
MAXIME
: J'ai pris mon service vers deux heures. J'étais de garde, vous
savez.
HAROLD :
Tu as déjeuné dehors ?
MAXIME
(sèchement) ! Tu veux la note du restaurant peut-être?
SCHNEIDER
: Cessez vos chamailleries et considérez le détail piquant de cette
affaire. Aux dires des journaux, cinq heures après sa mort la
victime aurait été vue faisant le trottoir devant les grands
magasins. Incroyable ce que ces torchons inventent pour faire du
tirage! Franchement, tout ce bruit autour d'un banal crime de
maniaque ou d'une vengeance de souteneur, je n'aime pas ça. On
imagine déjà le résultat, demain ils titreront « Que fait la
police ?», les prostituées vont se mettre en grève, les
maquereaux régler leurs comptes pendant que nous courons après des
fantômes : agitation trouble et pernicieuse. Toutes les vérités
ne sont pas bonnes à dire, et surtout pas à étaler au grand jour.
C'est à vous faire regretter d'être libéral. Ah, l'heureux temps
où je faisais partie des commissions de censure ! L'étranger
se faisait alors une autre idée de la France. On ne remuait pas la
boue, et si l'on pataugeait dedans, tout le monde prétendait
regarder ailleurs. Mais quoi ! plus de principes, la
désaffection des églises, la corruption dénoncée publiquement à
la télévision. L'information est néfaste: elle accélère la
désagrégation sociale, elle encense les criminels ordinaires, les
fait passer pour des héros sous prétexte qu'ils ont eu une enfance
malheureuse…
MAXIME
: Comme s'il n'y avait qu'eux !
SCHNEIDER
: ...et nous pour de vrais incapables! Bientôt nous ne pourrons plus
lutter.
HAROLD
: Une tasse de café, monsieur Schneider ?
MAXIME
: Inspecteur, Harold !Un peu de respect pour la fonction!
SCHNEIDER
: Mais non fiston, c'est moi qui lui ai permis. (à Harold) Non
merci mon garçon, le café le soir me fait trembler le bras quand je
vise, et puis, n'est-ce pas Maxime ? nous sommes pressés.
MAXIME
: Je vous suis Inspecteur, aveuglement.
SCHNEIDER
: Vous n'êtes pas armé, au moins ? N'oubliez pas, vous
m'accompagnez à titre amical, vous n'êtes pas en service. Nous nous
en tenons au règlement, et au pied de la lettre. Cela pourrait faire
des jaloux parmi vos camarades si l'on savait que je s'occupe de si
près de votre... carrière.
MAXIME
: Je suis à vos ordres, Inspecteur.
SCHNEIDER
: Eh bien, au revoir Harold, c'était très bien votre dîner sur le
pouce, une atmosphère chaleureuse et familiale, une oasis de repos
pour les aventuriers urbains que nous sommes.
MAXIME
: Salut Harold.
Il
l'embrasse sur les deux joues.
Ne
te couche pas trop tard. Et pas de bêtises ! Madame Pamela te
verra si tu sors. Demain matin interrogation sur la constitution
américaine et les régimes matrimoniaux, alors révise.
SCHNEIDER
: Hé, étudiant en droit? ça nous changerait de ces salopards de
juges rouges si ce petit devenait magistrat !
Ils
sortent. On entend Schneider dans d'escalier.
Vous
avez du mérite, Maxime, de vous intéresser de si près à ses
études... Alors comme ça, vous êtes orphelin ? racontez-moi
un peu…
Harold
débarrasse, essuie la table, quitte son tablier, décroche
la casquette du pote-manteau, la caresse, va la ranger
dans la chambre. On frappe.
Mme
PAMELA (derrière la porte) : Monsieur Harold ? Ils sont
partis? Je peux entrer vous dire bonsoir ?
Harold
ouvre.
Du
monde à l'improviste n'est-ce pas ?
HAROLD :
Oui, mon frère a ramené son chef.
Mme
PAMELA : Oh, comme ce doit être excitant toute cette agitation !
HAROLD :
Et ce n'est peut-être pas fini pour ce soir.
Mme
PAMELA: Comment ça ? une grosse cachotterie, monsieur Harold ?
Oh ! vous aller me mettre dans la confidence ?
HAROLD :
Ce sera notre secret, alors ?
Mme
PAMELA: Bien sûr, comme le dîner de ce soir, le repassage et... le
reste.
HAROLD
: Vous êtes si bonne pour moi, madame Paméla !
Mme
PAMELA: Quand on a eu une vie de peine et de labeur comme la mienne,
qu'on se retrouve seule, qu'on a perdu parents et enfants, on se fait
un devoir de soulager la misère des autres ... Vous savez bien,
monsieur Harold, que je ne suis pas une mauvaise femme ?
HAROLD
: Tout le monde le sait , vous êtes la plus méritante des logeuses
du quartier, et la plus dévouée des fidèles de notre paroisse.
Sans vous, point de fleurs à l'église, les pigeons qui roucoulent
sur notre toit seraient morts de faim cet hiver, et nous, à la rue
peut-être.
Mme
PAMELA : Mais tous ces regards dans la rue qui m'accusent ! Oh, le
mépris des honnêtes gens, les chuchotements dans mon dos dès que
j'ai passé la porte des commerçants... Vous savez bien que ce ne
n'était pas ma faute, je ne pouvais pas les nourrir.. . Je n'aurais
pas pu les aimer, et maintenant ils sont morts peut-être, et je ne
le sais même pas.
HAROLD
: Vous vous faites du mal pour rien Madame Paméla .
Tranquillisez-vous, les orphelins comme moi n'en veulent pas à leurs
parents d'occasion, ils ne les connaissent pas, alors ils les
vénèrent parce que dans leurs rêves ils demeurent irréprochables.
Les autres au contraire conservent toujours des griefs contre eux,
ils passent la moitié de leur vie à essayer de les oublier , ils
donneraient n' importe quoi pour les échanger, mais ça ne se peut
pas. Mais vous et moi, nous nous sommes choisis, nous avons eu de la
chance de nous trouver. Aucune mère ne saurait être aussi gentille
que vous.
Mme
PAMELA : Oh mon petit Harold... je sens que je m'attendris, c'est ma
nature profonde qui reprend le dessus, il ne faut pas... Racontez-moi
plutôt ; elle est jolie ?
HAROLD
: Qui?
Mme
PAMELA : Mais , votre cachotterie, notre secret Harold.
HAROLD
: Mieux, elle est belle. Elle va venir, vous la verrez si vous restez
à la fenêtre . Elle avait l'air tellement désemparé… Vous ne
direz rien à Maxime ? Je crois qu'elle cherche une chambre,
alors
vous pourriez peut-être...
Mme
PAMELA : Je ne sais pas. Il me reste bien la chapelle, mais je suis
en pourparlers avec un étudiant en théologie qui m'en offrirait un
bon prix ; sinon, je ne vois que la cellule,, mais il y fait froid,
et puis les barreaux et les chaînes, ce n'est pas très gai pour une
jeune fille.
HAROLD
: c'est que... je lui ai laissé espérer…
Mme
PAMELA : Vous auriez dû me consulter avant de vous avancer. Si je
ferme les yeux sur cette visite, par amitié pour vous, je dois vous
prévenir que je ne suis guère favorable à l'idée d'installer des
jeunes filles sous mon toit. Cela attire toutes sortes d'individu
indésirables. Que diable ! Ce n'est plus un bordel ici !
HAROLD
(choqué) : Oh, Madame Paméla, c'est une jeune fille tout ce
qu'il y a de plus correct. et Je la reçois en tout bien tout
honneur !
Mme
PAMELA : Je sais Harold que tu es un gentil garçon. Mais Maxime
aussi, et il ne faut pas trop lui mentir. Si cela devenait sérieux,
je serai forcée de lui en parler. Je n'ai jamais su longtemps mentir
; la vérité malgré moi sort toute nue de ma bouche.
HAROLD
: Vous savez bien qu'il surveille mes sorties et m'interdit de lier
connaissance avec des étrangers. Ses réactions sont tellement
violentes.
Mme
PAMELA : Et imprévisibles !
HAROLD
: C'est pour ne pas le faire souffrir que je me tais.
Mme
PAMELA : Il veut te protéger parce qu'il a vécu. Il sait mieux que
toi ce qui est dangereux. Il faut se méfier des jeunes filles sans
expérience. Avec les femmes mûres, évidemment, ce n'est pas
pareil. Elles connaissent les douleurs et les pièges de l'existence.
Si cela arrivait maintenant…
HAROLD
: cela quoi ?
Mme
PAMELA : Je saurais éviter les drames, je serai douce et toujours
disponible. Je ne ferais pas souffrir celui que j'aime. Les
adolescentes ne savent pas ce que c'est que l'amour. Mais moi on peut
me faire confiance, je sais comment n'y prendre. Vois-tu, mon petit,
j'ai bien souffert de la violence des hommes. Deux fois j'ai été
abusée, j'étais bien jeune alors, ma mère tenait encore commerce
et je ne comprenais pas pourquoi j'avais une si grande famille, des
oncles et des tantes qui si gentils avec moi.
On
sonne.
HAROLD
: La voilà, c'est elle, elle est venue au rendez-vous, je suis
tellement heureux, Madame Paméla !
Mme
PAMELA: Un baiser là, sur le front, pour acheter mon silence.
Il
l'embrasse distraitement.
Et
donnez-moi l'uniforme de votre frère que je le repasse pour demain.
Sinon il criera et il se doutera de quelque chose.
HAROLD
: Vous êtes mon ange-gardien Madame Paméla.
Il
va chercher l'uniforme dans la chambre, le donne à Mme Paméla,
croise les doigts, porte la main a son cœur et dévale l'escalier.
Mme
PAMELA (seule) : Ah, le drap bleu, un peu rêche au toucher,
le même tissu qu'il portait. Il se faisait appeler Eddy mon
Frédéric, un vrai prénom de cinéma. Ma mère le faisait entrer
gratis et lui glissait un petit billet s'il ramenait du beau monde.
Elle
frotte le tissu contre sa joue.
Pour
un peu il y aurait encore son odeur à l'endroit où la sueur
imprègne le tissu, à l'endroit où l'usure le rend brillant.
Des
pas dans l'escalier; elle se prépare
à sortir quand entre Catherine. Mme
Paméla la toise avec mépris et dit
sèchement :
Bonsoir,
ma fille. Et n'oubliez pas, ici, c'est une maison honnête. Vous
m'avez bien comprise ?
Elle
sort. Harold entre derrière Catherine.
HAROLD
: Ne vous inquiétez pas mademoiselle, elle joue les adjudants mais
c'est un cœur d'or en vérité, une femme qui a eu bien du malheur,
perdu ses enfants, violée à dix-huit ana sous le toit de sa propre
mère.
Catherine
pleure, renifle.
Vous
pleurez ? C'est merveilleuse Vous avez donc le cœur sensible à
ce point ?
CATHERINE
: Il doit y avoir des gens qui sont faits pour le malheur ; à
qui la vie ne réserve que des surprises désagréables !
HAROLD
: Comme vous êtes bonne, elle est dure avec vous et voue la plaignez
!
CATHERINE
: Oh, je parlais de moi vous savez.
HAROLD
: Vous avez donc été bien malheureuse ! On ne soupçonne
jamais les plaies des autres.
CATHERINE
: Ce n'est pas bon de s'apitoyer sur soi-même. Il faut m'excuser,
mais je me sens si faible, si seule, si perdue. Voila, je range mon
mouchoir, j'oublie mes ennuis.
HAROLD
: Ce n'est pas grave, pleurer fait du bien : « Tout ce qui
reste à l'intérieur pourrit » ; c'était une devise des
jésuites, savez-vous ? Cela soulage souvent de se confier.
CATHERINE
: Il y a des choses qu'on se fait honte d'avouer.
HAROLD
: Songez à moi comme votre confesseur.
CATHERINE
: Mais je ne sais rien de vous, je vous connais à peine .
HAROLD
: C'est merveilleux, justement! Nous avons tout le temps de découvrir
ensemble.
CATHERINE
: Mon histoire n'a rien d'amusant ! abandonnée à la naissance ;
j'ai été élevée dans un orphelinat de province.
HAROLD
: C'est merveilleux !
CATHERINE
: Un rien vous tire des cris admiration! Eh bien non, c'était
sinistre l'orphelinat !
HAROLD
: Je sais.
CATHERINE
: Si vous vous moquez de moi, je n'en vais.
HAROLD
: Non. Comprenez : ce qui est merveilleux, c'est que nous sommes
orphelins tous les deux. Moi aussi j'étais un gosse égaré. Vous
voyez, c'est un signe, nous étions faits pour nous rencontrer.
Vraiment, Schneider a raison, la vie a plus d'imagination que nous !
CATHERINE
: Schneider ?
HAROLD
: un homme remarquable, et philosophe aussi ! C'est le chef de mon
frère.
CATHERINE
: Mais vous disiez que vous étiez orphelin ?
HAROLD :
ça n'empêche pas, mon frère aussi. Oh, bien sûr, on n'est moins
orphelin quand on se découvre un frère. Et puis Max était un grand
frère merveilleux. Tous les autres reculaient devant son autorité,
ils imitaient sa démarche et ses manières pour se donner l'air
d'être des durs. Il défendait son prestige et mon honneur à coups
de poing. Quand nous sortions en rang et en uniforme pour la
promenade, il fermait la marche. Les surveillants lui faisaient
confiance, il gardait le troupeau. Plus loin sur la route il y avait
une sorte de pensionnat de jeunes filles. Quand il passait elles se
mettaient aux fenêtres et se faisaient la courte échelle pour le
regarder par dessus le mur. Il était beau, nous étions des gamins,
il avait d'air d'un homme… Mais vous pleurez encore ?
CATHERINE
: C'est que j'avais une sœur aussi.
HAROLD :
Pourra-t-on dire encore que nous nous sonnes rencontrés par hasard !
C'était notre destinée, n'est-ce pas ?
CATHERINE
: Je n'avais qu'elle, je n'avais qu'elle au monde. Quand l'orphelinat
a voulu nous placer, on nous a séparées.
HAROLD
: C'est extraordinaire !
CATHERINE :
Très courant au contraire, deux enfants cela fait beaucoup pour une
seule famille.
HAROLD
: Max et moi, nous avons été séparés aussi.
CATHERINE
: Dès que ma sœur a réussi à gagner un peu d'argent elle m'a fait
venir. Elle avait loué un petit appartement, pas loin d'ici
d'ailleurs.
HAROLD
: Le hasard continuait à nous rapprocher : un jour, vous verrez, la
chance se manifeste, et vous rend tout d'un coup tout le bonheur dont
on a été privé. Il faut y croire puisque nous nous sommes
rencontrés. Mais, pourquoi me disiez-vous cet après-midi que vous
cherchiez un logement? Vous ne vous entendez plus avec votre sœur?
CATHERINE
: Hélas, c'est elle qui ne peut plus m'entendre.
HAROLD
: Je ne comprends pas.
CATHERINE
: Elle est morte.
HAROLD
: C'est... C'est horrible ! Comment est-ce arrivé ?
CATHERINE
: Au début je ne savais pas quels sacrifices elle s'imposait pour
moi. Quand j'ai compris il était trop tard, elle était usée par la
vie et rançonnée par son protecteur. Mais c'est trop pénible, je
ne veux plus en parler, je ne veux plus voir les murs où nous avons
vécu ensemble. Je suis trop malheureuse.
HAROLD
: Je vous consolerai, je vous protégerai.
CATHERINE
: Vous m'offririez un toit ? Pour cette nuit au moins ?
HAROLD
(gêné): C'est que... la propriétaire... les voisins... et mon
frère qui va rentrer je ne sais quand, demain matin, ou dans la nuit
peut-être. Et il ne serait pas très content de vous trouver là.
CATHERINE
: où allez-vous quand ?..
HAROLD
: Quand quoi ?
Silence.
CA'I'HERINE :
Vous êtes gentil et naïf , Harold. Vous me croyez bonne fille,
et honnête. Je vais partir, je n'ai pas le courage de vous tromper.
HAROLD
: Mais nous avons à peine eu le temps de faire connaissance !
CATHERINE
: Justement, votre logeuse, elle, ne s'y est pas trompée. Je me
sens si sale... Il fallait pourtant que nous vivions, que je partage
sa honte. Vous ne comprenez pas ? Je me suis vendue pour de d'argent.
HAROLD
(sur un ton dégagé) : Ah oui ? Oh, vous savez,
j'ai les idées larges… plus que Max par exemple. C'est la misère
qui vous a poussée, et votre sœur malade.
CATHERINE
: Non, l’appât du gain, l'argent, le sale argent... Marie et moi,
nous étions jumelles. Toutes petites déjà nous avions compris les
avantages que nous offraient notre similitude, car nous étions
parfaitement identiques. Quand nous nous sommes installées ensemble,
pour des raisons d'économie d'abord, nous avons organisé notre
emploi du temps de façon à nous faire passer pour une seule et même
personne... Voilà, vous savez tout, c'est odieux !
HAROLD
: Mais vous vous repentez ?
CATHERINE
: Oui, je sais que la mort de ma sœur est le châtiment de notre
mensonge... Je vois bien maintenant que vous me méprisez.
HAROLD
: Ce serait de l'orgueil de ma part. Je suis ému par votre histoire,
touché par votre sincérité, vous m'avez fait confiance et je
voudrais tellement alléger votre douleur.
CATHERINE
: Alors venez vous asseoir près de moi.
HAROLD
: Je ferai l'impossible pour vous consoler.
CA'I'HERINE
: C'est curieux, on se croirait dans un train ?
HAROLD
: Oui, et autrefois le siège remuait. Ici, c'est un ancien
bordel...Oh, pardon !
CATHERINE
: Encore un signe du destin sans doute !
HAROLD
: Ça m'a échappé !
CATHERINE
: Ce n'est pas grave, J'ai l'habitude des hommes maladroits.
HAROLD
: Ne peut-on rien dire qui ne vous blesse ?
CATHERINE
: Plus de mots, Harold...
HAROLD
: Qu'allons-nous faire ?
CATHERINE
: Les gestes consolent mieux que les paroles.
HAROLD
: C'est que je n'ai qu'une expérience limitée en la matière.
CATHERINE
: Avec une aussi jolie frimousse ? un vrai gâche-métier
,aurait dit ma sœur.
HAROLD
: Oh madame !
CATHERINE
: N'est-il pas mignon ? Et il m'appelle madame, et il rougit en
plus ! Tu as une amie ?
HAROLD
Je ne vois pas beaucoup de monde en dehors de Max.
CATHERINE
Timide simplement ? Non, puceau peut-être?
HAROLD :Pas
vraiment, vous savez bien, l'orphelinat…
CATHERINE
: Je sais, je peux tout entendre, tout comprendre.
Silence.
Tu
me trouves laide peut-être ?
HAROLD :
Non, je…
CATHERINE
: Désirable alors ?
HAROLD :
Je ne sais pas.
CATHERINE
: Pourtant tu m'as fait venir en cachette de ton frère.
HAROLD
: Max croit toujours que mes relations avec les gens me détournent
de mon travail.
CATHERINE
: Et tu te sens seul ?
HAROLD
: Parfois la nuit, quand il me laisse.
CATHEHINE
: Et je suis si seule moi aussi, à peine la moitié d'une
survivante.
HAROLD
: Je serai ton petit frère, Cathy…
CATHERINE
(avec véhémence) : Non, non, je ne veux plus être
aimée comme une sœur, plus jamais ! Je veux l'amour d'un
homme, Harold, comme je n'en ai jamais eu parce que je suis une fille
sans père.
HAROLD
: D'un homme ? Comme vous y allez ! je ne sais pas si je
saurai.
CATHERINE
: Notre rencontre, tu l'as dit, c'était un signe du ciel. Nous
sommes nés pour nous retrouver. Marie est morte pour que je sois
dans tes bras cette nuit.
HAROLD
: Vous froissez ma chemise, Catherine.
CATHERINE
: Tu as la peau si douce. Je te fais peur ?
HAROLD
: Je…
Elle
l'embrasse, il essaye de se détacher d'elle, la porte s'ouvre, il
tombe de la banquette , Mme Pamela entre , elle tient un cintre de
bois sur lequel est pendu l'uniforme.
Mme
PAMELA: Je vois que je dérange. Eh bien j'arrive à temps! vous
alliez faire du joli Harold.
HAROLD
: Le ciel m'est témoin madame Paméla, ce n'est pas ma faute.
Mme
PAMELA : Tous les hommes disent la même chose ! Et vous,
défendez-vous mon petit !
CATHERINE
: Harold dit la vérité madame , c'est moi qui me suis un peu
laissée aller.
Mme
PAMELA : Alors, il faut partir tout de suite, avant que Monsieur
Maxime revienne. Vous comprenez ? Ce sera mieux pour tout le
monde.
CATHERINE
(se jetant à ses pieds, en pleurs) : Oh, je
vous en supplie madame, je n'ai plus de toit , je ne sais pas où
coucher. Je suis désespérée.
Mme
PAMELA : C'est le lot des femmes de votre espèce. Relevez-vous ma
fille , ça ne prend pas avec moi.
CATHERINE :
Je vous en prie, je me sens comme une bête traquée.
Mme
PAMELA : Vous n n'êtes pas recherchée par la police au moins ?
Catherine
se relève.
HAROLD
(gloussant) : Ce serait se jeter dans la gueule du loup !
CATHERINE
: Non, rassurez-vous, et je peux gagner ma vie.
Mme
PAMELA : C'est là précisément le point qui m'inquiète.
HAROLD
: Nous lui trouverons un travail honnête ?
Mme
PAMELA: Une fois qu'on a goûté au vice on ne peut s'empêcher d'y
retomber. Si je n'étais pas arrivée à temps d ailleurs…
CATHERINE
: Louez-moi une chambre pour la nuit au moins. Je m'en irai demain,
et personne d'autre ne saura.
Mme
PAMELA : Je ne sais pas si je dois, c'est une lourde responsabilité.
HAROLD
(prévenant et reprenant l'uniforme) :
Débarrassez-vous, madame Pamela.
Mme
PAMELA (après réflexion) : Je suppose que vous louer
une chambre est encore le meilleur moyen d'éviter le pire. Ce serait
invivable s'il se passait quelque chose de grave et que nous soyons
obligés de nous soupçonner les uns les autres. Je ne voudrais pas
introduire un fruit pourri dans notre petit jardin d'Eden. Et puis je
n'ai plus rien qui convienne à une jeune fille. Il reste la chapelle
à la rigueur. Vous êtes croyante au moins ?
CATHERINE
: Je respecte Dieu qui ne m'a jamais envoyé ni la syphilis, ni le
sida, juste quelques petits rhumes par les froides nuits d'hiver.
Mme
PAMELA : Je vous préviens, le mobilier est un peu spécial,
c'est-à-dire que le lit est en forme de cercueil, confortable
d'ailleurs, capitonné, oreillers de dentelle, première classe, mais
deux places naturellement.
CATHERINE
: Ce sera parfait. J'espère seulement que je n'aurai pas de
cauchemars.
Mme
PAMELA: Dormir dans un cercueil n'a rien d'impressionnant dès lors
qu'on est en paix avec sa conscience. Tenez, voici la clé, au bout
du couloir, dernière porte, allez voir.
C
ATHERINE : Merci madame, je ne saurais jamais comment vous prouver ma
reconnaissance.
Mme
PAMELA: Deux semaines de loyer d'avance seront une preuve suffisante.
Allez, je sais ce que c'est que d'être dans la mouise et de manger
de la vache enragée. Ah, les jeunes gens d'aujourd'hui n'ont pas
assez conscience de leur chance.
Catherine
sort.
L'uniforme
n'est-il pas bien repassé Harold ?
HAROLD
: Non, pas ce soir!
Mme
PAMELA: Regardez comme le pli est bien marqué.
HAROLD
: Je ne peux pas jouer, elle va revenir. Et Max peut rentrer d'une
minute à l'autre.
Mme
PAMELA: Si vous en étiez si certain, vous ne vous seriez pas attardé
avec elle.
HAROLD
: c'est trop d'imprudence, un jour nous nous ferons surprendre.
Mme
PAMELA:: J'ai besoin de vous, vous êtes si beau, vous portez si
bien la tenue !
HAROLD
: Tout de même, trois fois par semaine, cela devient intenable. Au
début Je croyais vous rendre service une bonne fois pour toutes.
Est- ce que vous n'oublierez jamais à la fin ?
Mme
PAMELA : Je suis toute gonflée de souvenirs, je suis devenue laide
et grosse à force de les laisser grandir en moi en espérant qu'ils
finiraient par m'étouffer. Mais ma pénitence n'est pas suffisante.
Dieu ne veut pas de moi ; il faut m'aider, Harold, à raviver ma
douleur pour expier mes fautes.
HAROLD :
Je ne veux plus !
Mme
PAMELA : En voilà un vilain caprice ! Et moi qui faisais tout
pour arranger les choses à votre convenance. Mais tout compte fait,
c'est inutile. Vous avez raison, il ne faut pas mentir à Maxime,
nous lui avouerons tout dès qu'il sera rentré.
HAROLD
: Que lui avouerons-nous?
Mme
PAMELA : Que certains soirs nous nous servons de son uniforme et que
vous invitez des demoiselles de petite vertu qui vous renversent sur
la banquette du train.
HAROLD
: C'est bon. c'est bon, je vais le passer, mais cette comédie ne
pourra durer éternellement.
Catherine
rentre. Pendant le dialogue qui suit Harold se déshabille pour
passer l'uniforme.
CATHERINE
: Ce sera idéal pour cette nuit.
Mme
PAMELA: Vous avez remarqué le vitrail?
CATHERINE
: Une splendeur !
Mme
PAMELA : Il représente l'annonce faite à Marie, c'est un cadeau
qu'un client de province qui aimait l'habit ecclésiastique avait
fait à ma mère pour ses Pâques. Et il vient de Lourdes, imaginez
un peu !
CATHERINE :
Je ne comprends pas bien ; qu'est-ce qu'il fait ?
Mme
PAMELA : Rien d'indécent rassurez-vous. Il m'aide à raviver
mes souvenirs défaillants.
CATHERINE
: Comme il a la peau blanche !
Mme
PAMELA : Il n'y a rien à redire, il est vraiment bien fait.
CA'I'HERINE
: Et ces jolies jambes, la rondeur des mollets, pas de ces pattes de
coq toutes maigres comme ont les adolescents de nos jours.
Mme
PAMELA : Oui, les muscles épousent si bien les formes du tissu qu'on
croirait qu'il n'y aura pas assez de drap pour les contenir.
CATHERINE
: Et cela souligne la taille bien prise. Et le V de ce buste, la
largeur des épaules ; ne croirait-on pas une statue du Louvre ?
Mme
PAMELA : L'esclave de Michel-Ange qui bombe le torse pour se
débarrasser de ses liens.
HAROLD :
Vous me gênez mesdames.
Mme
PAMELA: Cela vous est désagréable qu'on vous admire ?
HAROLD
: Ne m'aimant pas beaucoup moi-même, j'ai toujours l'impression
qu'on se moque.
Il
passe le pantalon, elles reprennent à voie plus basse.
CATHERINE :
Indéniablement l'uniforme lui sied.
Mme
PAMELA: Moins bien qu'à monsieur Maxime cependant. Maxime ressemble
tellement à Eddy.
CATHERINE
: Eddy ?
Mme
PAMELA : Chut ! il est prêt !
Harold
arpente la scène de long en large, écarte les femmes de son
passage, fait mine de sortir, rentre en claquant la porte.
HAROLD
(forçant sa voix) : Où est ta mère Pamela ?
Mme
PAMELA : Mais non monsieur Harold. vous vous êtes encore trompé :
Eddy, comme tout le monde en ce temps-là m'appelait par mon vrai
nom, Thérèse.
HAROLD
: On joue où on ne joue pas ? il faudrait savoir !
Comment voulez- vous que je me concentre si vous m'interrompez tout
le temps !
Mme
PAMELA : C'est mieux : là, vous approchez l'esprit du personnage.
HAROLD
: Tais-toi, souillon tu devrais avoir honte, tes mains sont rouges,
ta poitrine tombe déjà. Ta mère, voila une vraie femme, pas
effrayée par le travail, toujours au turf sans jamais se plaindre.
Mme
PAMELA : Si tu voulais de moi Eddy, je travaillerais d'arrache-pied à
faire le pied de grue.
HAROLD
: Avec ta santé fragile tu ne serais qu'une charge supplémentaire.
Où est mon petit cadeau Thérèse ? l'enveloppe de la semaine.. Non
vraiment, je ne veux plus madame Paméla. Tout cela est dégradant et
profanatoire, et salit l'image radieuse de la police.
Mme
PAMELA: Rien n'est dégradant Eddy, puisque je t'aime.
HAROLD
: Voila bien les femmes toujours à vous jeter leur amour à la
tête ! Toujours à vouloir vous lier les mains. Mon père le
disait bien : « Eddy, épouse une machine à laver, et pour le
défoulement, achète-toi une voiture ».
Mme
PAMELA : Il n'y a pas d'enveloppe Eddy, c'est moi le cadeau de la
semaine.
HAROLD
: Et qui te désirerait ? Suis-je un vieillard impuissant pour
m'amouracher d'une collégienne. Moi ? soyons sérieux, je claque des
doigts et les filles tombent comme des mouches, sept d'un coup comme
le tailleur de l'histoire. As-tu seulement considéré le matériel,
la largeur du buffet, la fermeté des muscles ? Tiens frappe,
là, au ventre, un mur de béton, mes abdominaux. Et je ne parle pas
des ressorts cachés de la mécanique, on croirait que je me vante.
CA'I'HERINE
: Quel spectacle dégoûtant !
Mme
PAMELA : (à genoux) : Je te paierai Eddy, si je te dégoûte.
HAROLD
: Payer, quel vilain mot, corrompre un fonctionnaire, c'est un délit,
Thérèse.
Mme
PAMELA : Pardon Eddy, je sais que tu es incorruptible, c'est moi qui
suis si misérable.
Harold
recule, elle le poursuit à quatre pattes.
HAROLD
: Toujours à te traîner le ventre à terre comme une chienne chaude
!
Elle
dégrafe son corsage et l'enlève.
CA'I'HERINE
: Seigneur, mais elle va se déshabiller !
Mme
PAMELA : Oh, Eddy, une laisse pour m'attacher à toi, et un joli
collier à pointes.
HAROLD
: Ne me touche pas, tu casses le pli de mon pantalon.
Mme
PAMELA: Je le repasserai à nouveau, Maxime, comme tous les jours.
HAROLD
: Vous vous trompez dans le texte... Mais faites donc attention! vous
allez arracher les boutons.
Mme
PAMELA: Tes Jambes, Maxime sont comme celles d'Eddy, aussi dure la
brosse de tes cheveux.
HAROLD
: Contrôlez-vous, voyons, vous n'aller pas me forcer à me servir
des menottes.
Il
détache la paire de menottes de sa ceinture et les garde à la main.
Mme
PAMELA : Pieds et poings liés, Maxime, Je suis à toi !
HAROLD
: Allons bon! la voilà qui délire à nouveau... Mme Paméla, je
veux bien essayer de vous faire plaisir, mais comprenez, cette
situation est vraiment désagréable, devant une amie, cet étalage
de notre vie privée !
CATHERINE
: Ne vous dérangez surtout pas pour moi, mais il me semble que
j'entends une sirène de police qui se dirige par ici.
On
entend une voiture qui s'arrête et des bruits de portière.
Mme
PAMELA (extasiée) : Seigneur, il revient !
HAROLD
: Nous sommes bons pour le flagrant délit.
CATHERINE :
Je ne veux pas le voir Harold,, il me fait tellement peur !
HAROLD :
Vite, cachez-vous dans la chambre.
La
porte du rez-de-chaussée claque.
CATHERINE
: c'est vraiment la maison des portes qui claquent, ici !
Mme
PAMELA : Ah, restez polie ! la singularité de la situation ne
saurait justifier vos écarts de langage !
Elles
se retirent dans la chambre. Harold éteint dans la plus grande
précipitation. La porte s'ouvre.
MAXIME
: Hou! il fait sombre comme dans une âme de criminel ici. Où est
donc cette foutue lumière ?
Il
tâtonne sans trouver le commutateur. .Harold se tient à
l'avant-scène, dos à lui.
Vingt-deux!
un flic, Je suis fait ! Ils ont retrouvé ma trace. Et il a déjà
préparé les bracelets... Eh collègue ?.. Vous cherchez
quelqu'un ?.. quelque chose peut-être ?.. (faussement
jovial) Pas de perquisition sans mandat, vous savez ?.. Ma
parole, il est raide comme la justice ! Pourquoi ne répond-t-il
pas... Et cet imbécile de Schneider qui a voulu que je laisse mon
arme ! Il faut pourtant que j'arrive jusqu'à la chambre.
HAROLD
: Non, Max !je vais t'expliquer.
MAXIME
: Pas de familiarités intempestives tant que vous n'avez pas établi
les preuves formelles de ma culpabilité.
HAROLD
(comme en lui-même) : Quelle culpabilité ?
MAXIME
(soulagé) : Il ne sait rien!
Harold
se Jette à ses pieds.
HAROLD
: Oh Maxime. tu sais bien que je t'aime et que je ne pensais pas à
mal.
MAXIME
: Ça alors! je ne pensais pas avoir déjà causé tant de ravages
sans m'en apercevoir jusqu'au sein de mes relations de travail. La
situation devient pour le moins cocasse. Gilbert ?..René ?..
Il faut faire toute la lumière sur l'incident.
Il
allume.
Comment ?
Harold ? Et dans mon uniforme ? Il m'avait bien semblé aussi
que depuis que tu t'étais fait réformer tu développais un goût
paradoxal pour les vêtements militaires !
Il
inspecte la pièce.
Et
tu donnes aussi dans le chemisier de dentelles ? Inutile de
mentir, je suis atterré par la soudaine révélation de tant de
vices ! Et moi qui te prenais pour un garçon sage ! Il s'en
passe de belles dès que j'ai le dos tourné. C'est donc Carnaval
toute l'année dans cette tôle ?
HAROLD
(timidement) : Ce n'est pas à moi.
MAXIME
: Tu l'as volé sans doute, petit inconscient ? Sais-tu que les
magasins sont pleins de caméras de surveillance ? Je serai la
risée du Commissariat si tu te fais piquer. As-tu seulement pensé
un instant à ma carrière ?
HAHOLD :
C'est le corsage de Madame Paméla.
MAXIME
: A d'autres ! depuis quand se déshabille-t-elle dans notre
salle-à manger ? Elle aura eu un malaise, et elle est couchée dans
notre chambre peut-être ?
HAROLD
(bafouillant) : Voilà, c'est exactement ça... la vue du
sang…
MAXIME
: Ah, n'aggrave pas ton cas en te payant ma tête. Et toi que
faisais-tu dans ma tenue de service ?
HAROLD
: Il fallait reprendre la couture derrière, je servais de mannequin,
et madame Paméla s'est piquée, et comme elle avait un peu bu…
MAXIME :
Hop là ! la Belle-au-bois-dormant s'est effondrée la moustache
en croix sur le carreau... Je vais te la réveiller, moi !
HAROLD
: Non !.. E1le... est à moitié nue.
MAXIME :
Pendant les heures de service, comme le médecin, je ne suis plus un
homme. Et puis j'en ai vu d'autres !
Harold
tremble, Maxime se dirige vers la porte de la chambre et l'entrouvre.
Tiens ?
à en juger par la forme des draps, elle est mieux conservée que je
ne croyais la vieille ! C'est curieux comme la vérité parfois est
difficile à croire. J'en parlerai à Sohneider pour avoir son avis
sur la question. ( A Harold,
cassant) L'inspecteur a oublié un dossier qui a dû glisser
sous les banquettes. Cherche Harold !.. Tu as de la chance que
je sois pressé Tu vas m'enlever tout ça immédiatement, et dès que
Cendrillon aura recouvré ses esprits tu me la renvoies dans ses
foyers ; mon lit n'est pas une auberge espagnole.
HAROLD
: Voilà le dossier.
MAXIME
: Et les jumelles dans ma chambre ?
HAROLD
(dubitatif) : Euh, jumelles, dis-tu ?
MAXIME
: Jumelles: instrument d'optique pour voir de loin sans être vu,
celles dont tu te sers le soir pour épier les voisins.
HAROLD
: Ne bouge pas je te les apporte.
Il
rentre dans la chambre.
MAXIME
(seul): La prochaine fois j'éviterai la sirène, nous verrons bien.
HAROLD
: Voilà.
MAXIME
: Nous reprendrons cette affaire point par point demain matin,
confrontation générale et interrogatoires séparés... Tu ne me
mentirais pas, n'est-ce pas, Harold ?
Il
le prend par le menton, cherche ses yeux.
HAROLD
: Je... je ne pourrais pas !
MAXIME :
Et puis, elle est bien vieille pour toi, elle pourrait être ta mère
!
Harold
: Que vas-tu imaginer !
MAXIME
: c'est bon : il faut que j'y retourne. Soyez sage, et couchez- vous
vite.
Il
sort en claquant la porte. Les femmes sortent de la chambre.
Mme
PAMELA (avec ravissement) : Oh, quelle humiliation !
J'ai cru mourir dix fois !
CATHERINE
: J'ai eu si peur. Il m'a vue dans le lit, et il ne m'a pas reconnue.
Mme
Paella remet son corsage.
HAROLD
: Comment aurait-il pu vous reconnaître ? Il ne vous a jamais
vue.
CATHERINE
: c'est la peur qui me fait dire des sottises.
HAROLD
(protecteur) : Redescendez vite Madame Paméla, et n'oubliez
pas, vous avez eu un malaise.
Mme
PAMELA ;: Je vais vraiment en avoir un si je ne prends pas un
petit verre de chartreuse. Que de surprises en une nuit ! Comme
ça me rappelle ma jeunesses !
Elle
sort.
CATHERINE
: Oh Harold, tu as menti, pour me protéger, et avec quelle
autorité !
Harold
se regarde dans le miroir.
HAROLD :
C'est vrai qu'on est bien dans cette peau-là, le tissu vous pèse
lourd sur les épaules. on est lesté par le poids de son arme.
CATHERINE
: Et ça te va si bien Harold. que tu as l'air plus épais, plus
grand, plus fort.
HAROLD
(enchaînant) : A l'aise, résolu, sûr de moi.
CATHERINE
: J'ai eu si froid, si peur. Touche ma main, j'en tremble encore.
HAROLD
: Mais je suis là pour que tu n'aies plus peur.
CATHERINE
: Je me sens tellement rassurée dans tes bras. Serre-moi fort
Harold, mon agent, mon flicard, mon petit poulet d'amour.
Il
l'embrasse.
HAROLD
: Tu veux me faire plaisir ? S'il te plaît, appelle-moi Maxime.
Rideau