mercredi 27 décembre 2017

Anonyme Evangiles de Sodome



Tandis que je creusais un puits dans mon jardin stérile au désert, j'ai mis au jour ces manuscrits.

Evangile du Légionnaire


Moi, optio carceris, détaché de la 10è cohorte, second du centurion Petronius commandant la garde du procurateur de Judée, témoigne de ce que je vis de mes propres yeux :

La Grandeur parfaite se repose dans la Lumière indicible. Merveille insaisissable que cette écriture au sujet de l’eau inappréhendable, inconcevable ; c’est de nous qu’est cette parole « C’est Moi qui suis en vous et vous qui êtes en Moi comme le Père est en vous en toute innocence.»

L’apôtre Philippe dit : « Joseph le charpentier planta un jardin parce qu’il avait besoin de bois pour son métier. C’est lui qui fabriqua la croix avec les arbres qu’il avait plantés. Et sa semence était suspendue à ce qu’il avait planté. » Sa semence, c’était Yeshua et ce qu’il avait planté, c’était la croix. Mais l’arbre de la vie était dans le milieu du paradis et c’est par le truchement de l’olivier dont provient le chrême qu’advint la résurrection.

Nous, soldats survivants de la décimation, livrés au châtiment et aux bêtes sauvages, méprisés, sommes la lie de la terre, la glaise sur laquelle Tu as soufflé l'esprit, les oiseaux créés de la boue qu'enfant tu fis s'envoler tels une nuée de faucons.

Un homme vint à notre camp, proposant de nous livrer le Maître de Justice que nous avions reçu pour ordre d'arrêter sans rien connaître qui nous le permît.

« Tu es venu te dénoncer, seul ? Pour quel autre salaire que te faire violer par nos membres ? »
Après l'avoir pénétré tous les quatre, nous lui remîmes les trente deniers que valait sa trahison. Il les dépensa en vin pour nous payer à boire, afin que nous l'honorions à nouveau ; ce n'était pas de trop, privé que nous étions d'en connaître d'autres que nos camarades.

Un homme vint à nous et dit : « Vous viendrez au jardin des oliviers, afin que vous ne vous trompiez pas de tronc, j'embrasserai celui que vous voulez prendre, car autrement vous ne pourriez ni le reconnaître, ni le connaître. Il les a tous pris grâce à un subterfuge, car il n’est pas apparu tel qu’il était, mais c’est tel qu’on serait capable de le voir qu’il s’est montré. C’est à tous qu’il est apparu ; aux grands sous l’aspect d’un grand ; aux petits sous l’aspect d’un petit ; aux anges sous l’aspect d’un ange et aux hommes sous l’aspect d’un homme. C’est pourquoi son Verbe est resté caché à tous. Certains l’ont vu en croyant se voir eux-mêmes. Mais lorsqu’il apparut en gloire à ses disciples sur la montagne, il n’était pas petit. Il devint grand, mais pour qu’ils le puissent voir grand, il fit grandir ses disciples.»

Le centurion dit : « Branle-nous, nous le ferons ! »

Au jardin de Gethsemani, la nuit étant tombée, nous allâmes sans notre cohorte. Judas se leva et baisa les lèvres de Yeshua. « Je t'avais choisi pour que tu me trahisses » ajouta celui-là, et se tournant vers les autres disciples, « ne sortez pas vos glaives, celui qui se sauve par le fer mourra par le fer ». Judas devint si semblable à Yeshua par son langage et dans son visage que nous crûmes que c'était lui. Les disciples cherchaient où était le Maître : « C'est toi, Seigneur, notre Maître! Nous as-tu oubliés ? » Mais il nous dit en souriant : « Etes-vous fous? Je suis Jude le jumeau. »
Après avoir entendu ces paroles comme hors d'eux-mêmes, les disciples s'enfuirent. Jean qui dormait enveloppé d'un drap s'éveilla et s'enfuit. Comme un soldat l'avait saisi par le drap, il laissa le drap et se sauva nu.

Les soldats s'emparèrent de Judas et le ligotèrent non sans dérision car il niait la vérité qu'il était Yeshua. Ils lui disaient en se moquant de lui : « Ne crains pas, Seigneur, nous sommes venu pour te faire roi d'Israël ! Nous ne t'avons ligoté que parce que nous savons que tu refuses le royaume! » Judas répondit : "Avez-vous perdu la cervelle? Vous êtes venus prendre Yeshua avec des armes et des lanternes comme un voleur et vous m'avez ligoté pour me faire roi, moi qui vous ai conduits ici!"

Alors nous perdîmes patience et à coups de poings et à coups de pieds commençâmes à rendre à Judas la monnaie de sa pièce et en furie, le conduisîmes à Jérusalem.

[2 pages manquantes]

A la citadelle, le Centurion me chargea d'extirper le fils de l'Homme de sa cellule et de le conduire devant le Procurateur, selon les modalités qui me convenaient. Je lui ôtai ses chaînes sans autre rituel et le laissai sans tunique tel qu'il avait passé la première nuit dans sa prison. Le Centurion demanda si je l'avais soulagé et après mes dénégations, jeta devant lui son manteau quand il pénétra dans la salle du jugement ; devant lui les aigles dorées que portaient les autres légionnaires s’inclinèrent.

Le Procurateur irrité dit à l'assemblée : « Choisissez vous-mêmes des garçons forts et musclés. C'est eux qui porteront nos aigles : nous verrons si elles s'inclinent toujours seules. Je vous le jure par la vie de César, si les aigles ne s'inclinent pas à l'entrée de Yeshua, je vous ferai couper la tête. » Le Centurion nous choisit, l'optio statorum et moi, et le quatrième, un soldat du rang qu'on surnommait Herclé, car c'était une brute qui se tenait toujours le bras en l'air pour frapper. Yeshua sortit et entra de nouveau. A peine le seuil franchi, les aigles s'inclinèrent devant lui et le saluèrent !

Le Procurateur se retira avec le Centurion, son favori. Tel qu'il le raconta il demanda son conseil. Après l'avoir irrumé, Petronius lui dit, « livre-le nous, nous saurons comment t'en défaire. »

Le Procurateur descendit les marches marches du palais qui menaient aux piscines où les servants lavaient les agneaux de Pâques, et il harangua la foule réunie dans l'espoir du supplice. Sous les huées il fit paraître l'accusé. Son corps était puissant et ses cuisses velues.
Il dit : « Dois-je libérer Yeshua Bar-Abbas ou Yeshua le Nazôréen ?
Mais, le désignant il n'y avait qu'un seul homme sur qui le peuple crachait déjà, car il avait chassé ceux qui leur prêtaient de quoi vivre sur le pavé du temple, et avec ses complices, disait-on, en avaient étranglé d'autres pratiquant l'usure au profit des Prêtres. « Disposez-en selon ce que vous voudrez. S'il mourrait sous le fouet, cela nous épargnerait d'autres palabres. » Tels furent les ordres du serviteur de l'Empire.

Quand nous nous retirâmes aux abords des cellules le Centurion dit : « Il est à nous, et sa nuit est à nous, quelle que soit sa nature. »
Il ordonna qu'avant les sévices, nous jouions aux dés pour déterminer qui le pénétrerait le premier. Herclé le plus laid et le plus contrefait, le plus méritant car possédant la plus grosse mentule, tira deux as et s’empara de son gain. Dépouillé des derniers vêtements, le prisonnier geignait ; le vainqueur du jeu lui asséna quelques coups, suffisamment pour l'estourbir mais qu'il demeure conscient et le besogna jusqu'à satisfaction. Herclé éjacula mais le prisonnier ne rendit pas de semence. Nous étions des soldats, accoutumés à ces préliminaires, nous abusions de nous-même en nous enivrant, l'étape suivante n'apportant guère plus que la satisfaction du devoir accompli.

Le Centurion choisit les instruments du supplice. Il me tendit un fouet de cordes dont les nœuds se mêlaient d'esquilles de verres tranchant au lieu des tessons de terre cuites ou de fragments d'os, car il était dit que le verre issu du souffle glorifiait l'âme, et qu'il ne fallait pas briser le squelette de l'Agneau. Lui-même donna les premiers coups, le condamné lié à la colonne, visant les organes génitaux, clamant « Tu prêches la chasteté et que la reproduction est abominable, tu n'en as aucun besoin, il est juste que nous te fassions eunuque  » Puis nous le liâmes à l'étroite cage de fer qui avait servi à le reclure, afin de dégager son dos. L'optio statorium se drapant la main du subligaculum dont on l'avait dépouillé, se saisit de la lame que nous avions mise au feu et lui rasa la tête pour dégager ses épaules et permettre que la couronne d'épines préparée pour le moquer pénètre plus profondément dans son cuir. Inspiré par l'ivresse, le soldat plaqua la lame dans le sillon dorsal, la chair fuma. L'optio reposa la l'arme au feu. Quand les tisons l'eurent blanchie, il voulut s'en saisir à nouveau, mais ayant oublié le linge, il se brûla la paume au manche de la dague. Yeshua dit : « Je vais guérir ta main afin que tu puisses poursuivre ton office » et malgré ses entraves, il arrondit le dos pour recevoir le fer dont le dessin forma le patibulum de la croix.

Comme il nous défiait par sa résistance, la brute, celui que nous surnommions Hercle prit le flagrum ferré d'hameçons, assénant lentement mais violemment les coups pour que les crochets se plantent profondément et qu'il n'ait plus qu'à tirer vers l'arrière pour déchirer des lanières de peau sur son siège et le long des cuisses. En tant que gardien des prisons, j'avais vu nombre de fois des soldats battus de verges, des condamnés au cirque frappés de lanières à clous, mais jamais rien de comparable à cet écorchement. Le surveillant militaire, les sens enflammés par l'écoulement du sang et les lambeaux de muscles suintant dans les tranchées ouvertes des blessures, transportés par la musique déchirante des cris du supplicié s'était adossé au mur. Les yeux exorbités, il bavait en se masturbant furieusement de sa main où avaient disparues les cloques des brûlures ; son sperme gicla par trois fois sur les mollets du flagellateur. Seul le centurion contemplait le spectacle d'un air grave, clignant de ses yeux à demi-morts, car, vétéran des guerres contre les Parthes, il distinguait difficilement ce qui luisait dans les ténèbres sous l'éclat des brasiers. Quant Bar Abbas ne fut plus qu'une plaie sanguinolente, ses côtés avaient été épargnés pour qu'il survive, nous enfonçâmes à coups de bâton les épines dont nous avions eu la fantaisie de le coiffer.

Cette nuit-là, dans la tente commune préparée dans les jardins du palais pour notre quadrige de bourreaux, le Centurion rêva qu'il était reclus dans les ténèbres d' une citerne et que survenait du néant un lion qui le dévorait. Plusieurs fois dans la nuit il s'éveilla sans blessures, mais quelque apaisement qu'on lui offrît, le songe recommença et il se fit dévorer de nouveau.
La bête lui souffla : « Heureux est le lion que l’homme mangera, et le lion sera homme ; et souillé est l’homme que le lion mangera,et le lion sera homme. »

L'ombre dans la nuée dit - mais nous n'y primes pas garde car c'était un rêve comme dans l'ivresse :«En vérité, ceux-là, ne les tiens pas pour des hommes, mais compte-les parmi les animaux ; en effet, comme les animaux s’entredévorent, il en va aussi des hommes de cette espèce: ils s’entredévorent, mais ils sont exclus de la vie puisqu’ils aiment la douceur du feu et qu’ils sont esclaves de la mort et qu’ils se pressent vers les œuvres de la souillure. Ils portent à son achèvement le désir de leurs pères. On les précipitera dans l’abîme, et on les fouettera à cause de l’amère fatalité de leur mauvaise nature; on les flagellera, en effet, jusqu’à les faire fuir, tête basse, vers le lieu qu’ils ne connaissent pas, et ils perdront leurs membres, non dans l’endurance, mais dans le désespoir. Ils se réjouissent du feu par amour de la folie et de la divagation.

Le lendemain dans le prétoire, après l'avoir couronné d'épines nous ramenâmes Yeshua devant la foule. Sur la demande des prêtres le Procurateur lui demanda : « Je vois que tu portes couronne ; es-tu roi ? » « Tu le dis » répondit-il mais mon royaume n'est pas de ce monde. Et je ne suis né et je ne suis venu dans le monde que pour faire entendre ma voix à quiconque est de la vérité.
- Qu'est-ce que la vérité ? dit le procurateur.
- La vérité est du ciel, répondit Yeshua. Tu vois comment les maîtres du pouvoir sur terre jugent ceux qui disent la vérité !
- Le soleil m'en est témoin, je ne trouve rien dont on puisse accuser cet homme... Que ferai-je de toi ?
- Fais selon ce que tu as reçu.
- Et qu'ai-je reçu ?
- Moïse et les prophètes ont annoncé ma mort et ma résurrection.
Les prêtres murmurèrent : « Que peux-tu entendre de plus fort que ce blasphème ? »Tu n'es pas l'ami de César si tu le relâches. Il s'est dit fils de Dieu et roi. C'est donc ce roi-là que tu veux, et pas César ? »

Nous, les quatre soldats, ne comprenions rien à leurs arguties, mais à ces mots le Procurateur arracha le manteau de pourpre dont nous avions couvert Yeshua, et nous vîmes que malgré le bariolement de ses blessures, la marque au fer rouge de la croix dans son dos s'étaient effacé. Le Procurateur se tourna vers la foule et dit: « voici l'Homme ! Et la foule cria : « Au poteau »

Alors le Procurateur prit de l'eau et se lava les mains, face au soleil, disant : « Je suis pur du sang de ce juste ! A vous de voir ! » A nouveau les clameurs fusèrent parmi le peuple : « Que son sang retombe sur nous et sur nos enfants ! » Il fit tirer le rideau de la tribune où il siégeait, et il dit à Yeshua : « Ta nation a démenti que tu fusses roi. Voici ma sentence : tu as été flagellé selon la coutume [...] tu seras cloué en croix, dans le jardin où l'on t'a arrêté. Tes complices Dysmas et Gestas, seront [...] avec toi. »


Alors nous liâmes ses bras à un timon de char pour qu'il porte […]
et Simon revenu des champs fut aussitôt cloué par les paumes à la pièce de bois […] releva […] les marques des fouets sur ses épaules et l'arrière de ses cuisses
...
[30 lignes manquantes]


Il dit au bourreau « Ne perce pas mes mains, mais plus haut sur le bras, afin que je survivre suffisamment longtemps pour vous satisfaire ».

Et derrière lui cheminaient les révoltés qu'on avait désignés comme ses complices, qui, n'étant pas passé entre nos mains, n'avaient reçu que les quarante-neuf coups de fouets réglementaires, à qui les honnêtes gens jetaient des pierres, eux qui n'auraient que la corde au lieu des clous. « A vous ces ladres, ô citoyens de Jérusalem, baisez-les tels qu'il vous sied puisqu'ils vont mourir. Le châtiment de l'usurpateur appartient à Rome » le Centurion ordonna : « Elargissez-les pour introduire sans forcer la corne et l'épine pour les pénétrer » et Herclé introduisit la pointe de son glaive dans l'anus de Gesmas, fouraillant pour le distendre tandis que l'optio carceris retournait l'autre afin de le préparer à chevaucher la croix. Alors que son complice avait enduré la ponction sans crier, celui-là hurla sa douleur.

Le charpentier avait construit le sedile ; l'épine sur laquelle on l'assiérait n'était qu'un gros cône de bois, arrondi, sans pointe. Le crochet en forme d'index nous l'avions réservé au larron de droite, le Bacchus souffrant, Atys déchiré par le fondement, sorti à l'extérieur par les crocs de boucher quand il refuserait de mourir! Et mon âme s'émut en entendant ses imprécations.

Alors s'approcha l'autre Joseph, qui interrompit notre partie de dés et nous montra les acheteurs de la tunique qui se tenaient à distance. Le prix paya le vin de myrrhe. Nous le partageâmes avec le supplicié, lui infusant par force ce qu'il ne put cracher, sachant que la boisson en plus de l'ivresse accentuerait la turgescence de nos sexes et du sien.

Pour Yeshua l'humiliation devait excéder la douleur. Herclé fixa au bout d'une pique l'éponge imbibée d'hysope qui diminue les irritations anales et, l'homme étant toujours sur le dos, mains fixées à la traverse de bois, lui introduisit le pansement dans le rectum. Le centurion, monté aux premiers barreaux de l'échelle posa dans l'orifice du sedile sa lance brisée aux deux tiers, et nous hissâmes le patibulum. Petronius s'assura que la pointe émoussée de la lance se fiche dans l'anus, et tirant sur ses jambes, nous perçâmes à coups de marteau ses talons pour les arrimer au bois.

Après quelques minutes, ses bras ayant faibli, et les clous étirant ses jambes, il commença malgré lui à s'asseoir, et les efforts pour regagner la position droite résultèrent en une pénétration plus profonde. L'érection qui y succéda déclencha les quolibets de la foule : «Descends de ton trône, abandonne ta monture». Et Gesmas, lui dont le crochet déchirait la paroi rectale ajouta : « Voilà comment tu te donnes en spectacle, tu vas éjaculer devant la foule, alors que nous endurons » Et Dysmas, qui n'endurait que le cône de bois, mais n'avait pas bu le vin dit : « Tu n'as même pas crainte de Dieu, alors que tu subis le même châtiment ! Pour nous, c'est justice, nous payons nos actes : mais lui n'a rien fait de mal »
Et il disait : « Yeshua, souviens-toi de moi lorsque tu viendras dans ton Royaume.»
Il répondit en lâchant sa semence : « En vérité, je te le dis, aujourd'hui tu seras encore à mes côtés dans l'assemblée du Plérôme. »

La foule se dispersa, réjouie d'avoir assisté à ce qu'elle croyait être la conclusion du divertissement. De l'autre côté de l'échelle, soulevant la jupe j'avalai le vit du centurion que la scène et l'abus de vin aphrodisiaque faisait pointer à l'extrême, tandis qu'Hercle descendant les feminaliae de l'optio sodomisait avec brutalité notre camarade, lui promettant le baume apaisant dès qu'il se serait vidé en lui.

Gesmas dont les testicules avaient rejoint le bois émit un long jet de pisse. L'autre regardait vers le ciel dans une extase suspecte qui n'était que le masque de sa souffrance car son sexe restait flasque, ce qui compromettait sa future émasculation. De peur qu'il dure trop longtemps et nous fasse passer l'heure de la retraite, nous avons pris des gaules pour lui briser les os des jambes. C'était le mauvais travail, mais il fallait qu'il accouche de la mort pour monter vers le soleil. Ce monde est un mangeur de cadavres. La vérité est une mangeuse de vie. Voilà pourquoi aucun de ceux qui sont nourris de [vérité] ne mourra.

L'autre eut droit au traitement conventionnel afin qu'il meure de l'hémorragie externe ; je lui coupai moi-même les bourses et mes compagnons maniant l'alène comme des couturières novices les lui cousirent au lacet de cuir dont nous décorâmes son col. Je découpai péniblement son pénis pour le saigner à mort, et Herclé se hissant à la corde qui pendait de son coude disloqué le lui introduisit dans la bouche pour compléter le tableau.

Yeshua dit : « Tout est consommé ô ma force, tu m'a abandonné !"
Le centurion martela ses organes génitaux afin qu'il s'assît définitivement.
Ayant parlé, il fut élevé. La lance traversa son côté et un flux de sang et d'eau jaillit de sa blessure, éclaboussant les yeux du centurion. De l'eau qui était issue de la blessure, le Centurion regagna la vue et le soleil fuyant le blessa comme en plein midi. Il tomba à genoux et dit : « Ô vous qui ne voyez pas, vous ne voyez pas votre aveuglement ! C'était vraiment Son Fils, et nous l'avons empalé tel un esclave. »

A cet instant, le voile du temple de Jérusalem se déchira en deux.
Alors nous retirâmes les clous des mains du supplicié et l'étendîmes sur le sol. Et toute la terre trembla, et il y eut une grande frayeur. Oui la terre a tremblé, et nous avons vu la difformité des ombres de l'éclipse ; et les plantes du désert étaient traversées de clous, et leurs ombres montraient des rubans en volutes et les deuxièmes ombres derrière révélaient […]

[soixante lignes manquantes]

Le Procurateur donna à Joseph le doit de l'ensevelir en un lieu-dit son Jardin…

[…]

Inquiets, les Anciens vinrent trouver le Procurateur et le supplièrent en ces termes : «Donne-nous des soldats. Nous surveillerons son tombeau pendant trois jours, de peur que ses disciples ne viennent le dérober, que le peuple l'imagine ressuscité des morts et ne cherche à nous nuire. »

Ayant roulé la grande pierre, tous,aidés du centurion nous la poussâmes à la porte du sépulcre et
y apposâmes sept sceaux, puis dressâmes une tente pour monter la garde.

Il est vrai que la nuit étant favorable, et sans nous consulter sur les derniers prodiges nous nous enculâmes dans la satisfaction du devoir accompli.

Le lendemain, au commencement du sabbat, de Jérusalem et des environs arriva une foule qui voulait voir le sépulcre scellé. Dans la nuit qui précéda le dimanche, tandis que les soldats
relevaient la garde, deux par deux, une grande voix retentit dans le ciel.

Et nous vîmes s'ouvrir les cieux et deux hommes, nimbés de lumière, en descendre et s'approcher du tombeau. La pierre qui avait été placée à la porte roula d'elle même, et se rangea de coté, et le tombeau s'ouvrit et les deux jeunes gens entrèrent.
A cette vue, nous réveillâmes le centurion et les Anciens, qui étaient là, eux aussi à monter la garde.
Et quand nous leur eûmes raconté ce que nous avions vu, ils virent à nouveau trois hommes sortir du tombeau ; deux d'entre eux soutenaient le troisième et une croix les suivait. Et tandis que la tête des deux premiers atteignait le ciel, celle de l'homme qu’ils conduisaient par la main dépassait les cieux.
Et l’on entendit une voix disant d'en haut : "As-tu annoncé la nouvelle à ceux qui dorment ?"
Et de la croix on entendit la réponse: « oui».

Nous en débattions encore quand nous vîmes à nouveau les cieux s'ouvrir et un homme descendre et entrer dans le sépulcre.
A ce spectacle, le centurion et nous, dans la nuit, courûmes chez le Procurateur et en grand émoi, racontâmes tout ce que nous avions vu, disant: " Il était véritablement le Fils de Dieu."

S'étant approchés, tous priaient et suppliaient le Procurateur d'ordonner au centurion et à sa suite de ne répéter à personne ce que nous avions fait ou vu.
« Mieux vaut pour nous, disaient-ils, nous charger du plus grand péché devant Dieu, que de tomber aux mains du peuple et d'être lapidés. » Le Procurateur donna donc ordre au centurion de ne pas
souffler mot.
[…]

Ce faisant le centurion était retourné dans la tombe et se pencha pour regarder. Et il vit jeune homme, assis au milieu du tombeau. Il était beau et habillé d'un vêtement éblouissant. Il lui dit: « Pourquoi es-tu venu ? Qui cherches-tu ? Ne serait-ce pas le Supplicié ? Il est ressuscité et il est parti. Si tu ne me crois pas, baisse-toi et regarde l'endroit où il gisait. Il n'y est pas, puisqu'il est ressuscité et qu'il s'en est allé là d'où il a été envoyé. Ceux qui disent qu’ils mourront d’abord, puis qu’ils ressusciteront, se trompent. S’ils ne reçoivent d’abord la résurrection de leur vivant et s’ils meurent, ils ne recevront rien Il y en a certains qui ont peur de ressusciter nus ; c’est pourquoi ils veulent ressusciter dans la chair. Mais ils ne savent pas que ce sont ceux qui sont revêtus de la chair qui sont nus. Ce sont ceux qui [ ... ] … se dévêtir qui ne sont pas nus.

Alors le centurion apaisé par ses paroles le suivit parmi les apôtres qui s'étaient cachés pendant le supplice.
« Frappe et l'on t'ouvrira » dit l'Homme. Au-dedans était dressée la table du festin, mais au-devant des onze, selon ce qu'Il leur avait enseigné, ne se trouvait que la coupe et du pain sans levure. Montrant le centurion, il dit encore : «Je vous ai amené Longin, le porteur de la lance, afin que vous soyez de nouveau douze. Il vous surpasse tous car il a sacrifié l’homme qui me revêtait. Montrez-moi la pierre que les bâtisseurs ont rejetée : c’est elle, la pierre d’angle. »

Jude Tomas se leva et dit : « A qui tu es semblable, pour que je le dise, mon visage ne parvient absolument point à le saisir. »
« Frère Tomas, puisqu’on dit que tu es mon jumeau et mon véritable compagnon, examine-toi et comprends qui tu es et comment tu es ou ce que tu deviendras. C’est pourquoi donc, toi, mon frère Tomas, tu as vu ce qui est caché aux hommes. Je ne suis point ton maître, car tu as bu ; tu t'es enivré de la source bouillonnante qui est mienne et que j'ai répandue. »
Puis il le prit et s'écarta ; il lui dit trois mots. Et, lorsque Tomas revint vers ses compagnons, ils le questionnèrent : « Que t'a-t-il dit ? » et Tomas leur répondit : « Si je vous dis une seule des paroles qu'il m'a dites, vous prendrez des pierres et me les jetterez, et un feu sortira des pierres et vous consumera ! »
Dégrafant sa tunique, il prit les doigts de Tomas pour rouvrir sa blessure, et tendant le calice où s'était collecté le sang, il dit :

«Je me suis tenu debout au milieu du monde, et je me suis manifesté à eux dans la chair ; je les ai
trouvés tous ivres ; je n’en ai trouvé aucun qui eût soif ; puisqu’ils sont venus dans le monde vides, c’est vides aussi qu’ils cherchent à en sortir ; quand ils auront cuvé leur vin, alors ils se convertiront.
Je suis Christ, le Fils de l’Homme, qui est issu de vous ; je suis en vous pour être méprisé à cause de vous afin que vous-mêmes, vous oubliiez la différence. Et ne devenez pas femme de peur que vous n’engendriez le mal et ses frères : jalousie et discorde, colère et emportement, crainte et duplicité, et
désir vain, dépourvu d’existence. Quand j’étais dans la gueule des lions, ils m’ont châtié et je suis mort, non pas en réalité mais en apparence, car les outrages et la honte qu’ils m’infligeaient restaient loin de moi. En effet, cette mort qui est mienne et qu’il pensent être arrivée, [est arrivée] pour eux dans leur erreur et leur aveuglement, car ils ont cloué leur homme pour leur propre mort. En faisant cela, ils se condamnaient. Celui qui buvait le fiel et le vinaigre, ce n’était pas moi. Ils me flagellaient avec le roseau. C’était un autre, celui qui portait la croix sur son épaule. C’était un autre qui recevait la couronne d’épines. Quant à moi, je me réjouissais dans la hauteur, au-dessus de tout le domaine et au-dessus de la semence de leur erreur, de leur vaine gloire, et je me moquais de leur ignorance. Et j’ai réduit toutes leurs puissances en esclavage. Lorsque je descendis, nul ne me vit car je me transformais, échangeant une apparence pour une autre et, grâce à cela, lorsque j’étais à leurs portes, je les traversai facilement et je voyais les lieux, et je n’éprouvai ni peur ni honte, car j’étais immaculé. Et je leur parlais, me mêlant à eux par l’intermédiaire des miens, et foulant aux pieds leur dureté ainsi que leur jalousie et éteignant leur flamme. »

Après que Yeshua eut dit cela, il partit.
Nous les douze disciples du Seigneur, nous pleurions, nous étions dans le désarroi. Simon Pierre et André son frère prirent leurs filets et ils gagnèrent la haute mer... Et Longin était avec nous, que le Seigneur […]







Actes des soldats


Hermès Irénée Victor, dernier converti de la 7è légion, recense [...] pour la fin du temps ce que rapporta Longin le centurion, ses actes et ceux de Tomas […] le bien-aimé.

Lorsqu' ils me virent agenouillé devant le tombeau, les prêtres aidés d'un autre cohorte se saisirent de moi et m'enfermèrent dans une maison sans fenêtre, postèrent des gardes à l'entrée et scellèrent la porte derrière laquelle j'étais captif. Je dis au geôlier : «tu l'as vu comme moi se relever, et les tiens t'ont puni pour te convaincre de te taire. Ouvre-moi, ouvre-toi ! », et par la puissance de la foi la porte lourde pivota sur ses gonds. Quand il fut dans mes bras je vis les traces du fouet et des baguettes qui avaient lacéré son dos et j'y posai les mains pour apaiser ses blessures.

Ils ne le comprendront pas, ô bien-aimé, mais tu bois à ma source. Le mal que tu éprouves, l'épieu de la croix en toi, ton supplice, te rend pareil à moi, écartelé par la connaissance, soldat puni sans raison que le doute, sanctifié par la torture, écartelé par l'éclat de la révélation, la distorsion de mes mains en prière. Tu témoigneras que je t'ai donné une deuxième fois la vie et fait fleurir la rose que tu cachais en m'attendant, cette fleur sans épine, dont le cœur noir était avide de m'aspirer.
Le lendemain quand les prêtres vinrent à la prison dans le dessein de me mener devant le Procurateur, ils ouvrirent la porte, mais ne me trouvèrent pas à l'intérieur. Le peuple entier fut stupéfait et même saisi de terreur quand il s'aperçut que les sceaux étaient intacts et que leur chef lui-même avait gardé la clef. Et ils n'osèrent plus lever la main sur ceux qui qui s'étaient placés à la suite du Sauveur.

« Vous m'avez enfermé le vendredi, vers la dixième heure, et je suis resté là tout le samedi. Mais à minuit, tandis que j'étais debout à prier, la maison où vous m'aviez enfermé se souleva par les quatre coins et une sorte d'éclair vint éblouir mes yeux. Epouvanté, je tombai à terre. Alors quelqu'un me prit par la main et m'enleva de l'endroit où je gisais, et une eau fraîche coula sur moi de la tête aux pieds, tandis que des effluves de myrrhe emplissaient mes narines. Il m'essuya le visage, m'embrassa et me dit : « Ne crains pas. Ouvre tes yeux et regarde quel est celui qui te parle. » Levant mon regard, je vis Yeshua. Mes frayeurs redoublèrent. Je pensai que c'était un fantôme et je me mis à réciter les commandements. Mais il les récita avec moi .Alors je m'écriai : « Rabbi Élie! » Il me dit : « Je ne suis pas Elie. - Qui es-tu, Seigneur ? lui dis-je.

Il ne répondit pas mais je vis en me retournant que nous étions devant la maison de Pierre.
[...]

Nous nous rendîmes à la mer à un moment opportun qui pour nous survint du fait du Seigneur. Nous trouvâmes un bateau amarré au rivage prêt pour appareiller et nous négociâmes avec les marins du bateau pour embarquer avec eux. Eux, de leur côté, montrèrent une grande courtoisie envers nous et nous acceptâmes qu'ils nous honorent pour prix de la traversée. Et il arriva que, après avoir appareillé, nous naviguâmes, remplis mais secs ; durant deux jour et une nuit. Après quoi un vent poussa le bateau et nous échoua sur une petite ville sise au milieu de la mer.
Quant à moi, je me renseignai sur le nom de cette ville auprès d'un vieillard assis sur le quai et je l’interrogeai sur le nom de la ville : « Le nom de cette ville est : « Demeure, persévère dans l’endurance » dit-il. Je répondis en disant : « C’est aussi pour cela que les gens l’ont, à juste titre, appelée “la première”.
Et il arriva que je partis vers la ville pour chercher . . . [ . . . ] un logement. Un homme sortit portant un linge serré autour de sa taille, ayant une ceinture d’or serrée sur lui ainsi qu’un voile noué autour de la poitrine, remontant sur ses bras et recouvrant sa tête et ses mains. Je regardais l’homme, car il était beau par son aspect et son maintien. Ce sont quatre parties de son corps que je vis : les plantes de ses pieds, une partie de sa poitrine, la paume de ses mains et son visage. Je devinais son sexe et il était incirconcis. « Si tu cherches mon nom, Lithargoël est mon nom, dont l’interprétation est “la pierre légère de gazelle” ». Je répondis en lui demandant : « Quel est le nom du lieu auquel tu te rends, et quelle est ta ville ? » Il me dit : « Tel est le nom de ma ville : “Dans neuf portes rendons gloire à Dieu, tout en étant conscients que la dixième est le sommet. Je veux te demander qui t’a donné le nom de Longin ? » Je lui dis : « C’est Jésus-Christ, par le baptême. C’est lui qui m’a donné ce nom. » Il répondit en disant : « C’est moi ! Reconnais-moi, Longin ! » Il se dépouilla de l’habit qui le couvrait, celui par lequel il s’était transformé devant nous. Nous ayant révélé que c’était Lui en vérité, nous nous prosternâmes sur le sol et l’adorâmes.
Nous comptions douze disciples dans la chambre haute : et les autres étaient Pierre, Jean, Jacques, André, Philippe, Tomas, Barthélemy, Matthieu, Jacques, fils d'Alphée, Simon le Zélote, et Jude, fils de Jacques.
« Comme moi, dépouillez-vous de vos vêtements Ainsi les sicaires ne pourront point vous les prendre. Lorsque vous vous dépouillerez sans que vous ayez honte, que vous ôterez vos vêtements et les déposerez à vos pieds à la manière des petits-enfants, et que vous les piétinerez ! Alors vous serez les fils du Vivant, et vous n'aurez plus de crainte. »
Les disciples dirent : « Maître, nous vous avons vu en vision, car nous avons eu de grands rêves la nuit […] Nous avons vu une grande maison avec un large autel à l’intérieur, et douze hommes — ce sont les prêtres selon nous — et un nom. Et une foule de gens attend à cet autel, jusqu’à ce que les prêtres [...] et reçoivent les offrandes. Mais nous avons attendu. Certains [...] deux semaines ; certains sacrifient leurs propres enfants,d’autres leurs femmes ; d’autres couchent avec des hommes ; d’autres sont impliqués dans des massacres ; certains commettent une multitude de péchés et d’actes illégaux. Et les hommes qui se tiennent devant l’autel invoquent ton nom, et parmi tous les actes de leur faiblesse, les sacrifices sont achevés […].»
Après avoir dit ceci, ils se turent, car ils étaient troublés.

« Pourquoi êtes-vous troublés ? En vérité je vous le dis, tous les prêtres qui se tiennent devant l’autel invoquent mon nom. Et ils ont planté des arbres sans fruits, en mon nom, de manière honteuse. Ceux que vous avez vu recevoir les offrandes à l’autel, c’est vous. C’est le dieu que vous servez, et vous êtes ces douze hommes que vous avez vus. Le bétail que vous avez vu amenés au sacrifice sont tous ceux que vous avez induit en erreur devant cet autel […] ... Après lui, un autre homme se tiendra là parmi les fornicateurs et un autre se tiendra parmi les massacreurs d’enfants, et un autre parmi ceux qui couchent avec les hommes, et ceux qui font abstinence, et le reste de ceux qui sont pollués, sans loi et dans l’erreur, et ceux qui disent : “Nous sommes comme des anges” ; ils sont les étoiles qui amènent toute chose à son achèvement. Car pour les générations humaines, il a été dit, « Regarde, Dieu a reçu ton sacrifice des mains d’un prêtre »- c’est-à-dire, d’un ministre de l’erreur. Mais au dernier jour, il leur sera fait honte. Détruisez ce temple et je le relèverai en trois jours. » Et les disciples comprirent qu'il parlait du temple de son corps.
Tomas dit : « je ne suis pas certain de Te reconnaître » et j'ajoutai : « Celui que ma lance a percé était circoncis. »
« Mon élévation m'a restauré dans mon intégrité : si la circoncision était utile, leur père les engendrerait circoncis de leur mère ; la vraie circoncision est dans l’esprit ; la mutilation du corps est l'artifice des faux prophètes. Pénétrez-vous sans répandre la semence et quand vos sexes ressortiront, ils seront à nouveau dans l'état de naissance.Un semeur sortit pour semer sa semence. Comme il semait, une partie de la semence tomba le long du chemin: elle fut foulée aux pieds, et les oiseaux du ciel la mangèrent. Une autre partie tomba sur le roc: quand elle fut levée, elle sécha, parce qu'elle n'avait point d'humidité. Une autre partie tomba au milieu des épines: les épines crûrent avec elle, et l'étouffèrent. Répandez la vôtre sur le sol, elle n'engendrera rien si vous ne fécondez l'esprit. »
Après cela il nous quitta en paix.
Cette même nuit je fus apparié à Tomas. Et tandis qu'il se répandait exalté par ma douleur, il parla de son alliance.

Tomas l'Athlète a écrit : « Le troisième jour, il se tint une des noces à Cana ; la mère du Sauveur y fut, et lui-même et nous, ses frères.
Le vin vint à manquer et Mariam dit « Ils n'ont plus de vin. »
Yeshua répondit : « De quoi te mêles-tu, Femme ? Mon heure n'est pas encore venue.»

Simon Pierre dit: « Que Mariam sorte de parmi nous, car les femmes ne sont pas dignes de la vie.» Et le Seigneur répondit : « Voici, moi je vais la guider afin de la faire mâle, en sorte qu’elle devienne elle aussi un esprit vivant semblable à vous les mâles, car toute femme qui se fera mâle entrera dans le Royaume des cieux. Des jours viendront en effet où vous direz: heureux le ventre qui n’a pas enfanté et les seins qui n’ont pas allaité. »

Mariam dit aux serviteurs : « Faites tout ce qu'il vous dira.»
Et elle pria pour que s'accomplisse l'union. «Malheur à vous qui aimez l’intimité féminine et le commerce souillé avec elle ! Car celui qui connaîtra père et mère, on l’appellera fils de prostituée. Toute union survenant entre deux êtres qui ne se ressemblent pas mutuellement est un adultère. Mais si de deux vous faites un, vous deviendrez Fils de l’Homme, et si vous dites : montagne, déplace-toi, elle se déplacera. »

Or il y avait six vieilles outres de peau contenant chacune de deux à trois mesures. Le Promis dit :
« Remplissez d'eau ces outres » et les serviteurs les emplirent jusqu'en haut. « Portez-en maintenant au Maître du Festin ». Dès qu'il eut goûté à l'eau changée en vin vieux ( il ne savait pas d'où venait ce vin mais ses serviteurs le savaient ), il interpella l'Epoux et lui dit : « Tout homme sert d'abord le bon vin et après que tous soit ivre, le plus jeune ; mais toi, tu as conservé le meilleur jusqu'à ce dernier moment. »

Il répondit : « Jamais homme ne boit du vin vieux et ne désire après boire du vin nouveau; on ne verse pas du vin nouveau dans de vieilles outres, pour qu'elles ne se fendent point, et l'on ne verse pas du vin vieux dans des outres neuves, afin qu'il ne se gâte. »

Et quand nous fûmes dans la chambre nuptiale, le Fiancé dit :« Celui qui boit à ma bouche sera comme moi ; moi aussi, je serai lui, et ce qui est caché lui sera révélé. Je suis entré dans mon jardin, mon fiancé, j ai cueilli ma myrrhe avec mon baume; j'ai mangé mon rayon avec mon miel, j'ai bu mon vin dont je t' enivre. Ouvre-moi, mon frère, mon ami, mon immaculé; car ma tête est couverte de rosée; les boucles de mes cheveux sont trempées des gouttes de la nuit. »

J'ai ôté ma tunique, comment la remettre? J'ai lavé mes pieds, comment les salirais-je?
Mon bien-aimé a passé la main par le trou de la serrure, et mes entrailles se sont émues sous lui.

Au dernier jour des Noces quand les outres furent de nouveau vidées, le Vivant dit : « Un personnage avait un vignoble qu'il avait donné à des cultivateurs pour qu'ils le travaillent et qu'il en reçoive d'eux le fruit. Il envoya son serviteur pour que les cultivateurs lui donnent le fruit du vignoble ; et ceux-ci s'emparèrent de son serviteur, le frappèrent et il s'en fallut de peu qu'ils ne le tuent. Le serviteur revint et le dit a son maître. Alors, le maître envoya son fils ; il se dit : " Sans doute respecteront-ils mon enfant ? " Mais, quand ils surent que celui-ci était l'héritier du vignoble, ces cultivateurs le saisirent et le tuèrent. Que celui qui a des oreilles entende. »

Le Verbe dit : « J'ai jeté un feu sur l'univers, et voici : je veille sur lui jusqu'à ce qu'il s' embrase. Certainement les hommes pensent que je suis venu pour jeter une paix sur l'univers. Mais ils ne savent pas que je suis venu pour jeter sur terre des discordes, le feu, l'épée, la guerre. Si en effet il y a cinq dans une maison, ils se trouveront trois contre deux et deux contre trois, père contre fils et fils contre père et ils se lèveront solitaires. »

« L’adultère survint d’abord, puis le meurtrier. Et il fut engendré dans l’adultère car il était l’enfant du serpent. C’est pourquoi il fut homicide comme son père également et il tua son frère. En vérité je vous le dis, les étoiles qui amènent les choses à leur achèvement, apparaîtront avec les générations, et elles finiront ce qu’elles ont dit qu’elles feraient. Alors elles forniqueront en mon nom et tueront leurs enfants […] et ...
Dieu est un mangeur d’homme. C’est pourquoi on lui sacrifie l’homme. Celui qui ne haïra pas son père et sa mère ne pourra devenir mon disciple et celui qui ne haïra pas ses frères et ses sœurs et ne portera pas sa croix comme moi ne deviendra pas digne de moi [...]

« Quand vous ferez le deux Un, et le dedans comme le dehors, et le haut comme le bas, quand vous ferez des yeux à la place d’un œil, et une main à la place d’une main, et un pied à la place d’un pied, et une image à la place d’une image, alors vous entrerez dans le Royaume. »

Et me souvenant de ma prison, je dis à Tomas : « Qui est esclave contre son gré sera capable d’être libre. Qui a été libéré par la grâce de son maître et s’est donné lui-même en esclavage ne pourra plus être libre. Je me suis levé pour m'ouvrir à mon bien-aimé, et de mes doigts a dégoutté la myrrhe exquise, sur la poignée du verrou. Ses joues sont comme des parterres de baumiers, des carrés de plantes odorantes ; ses lèvres sont des lis, d'où découle le nard le plus pur. Ses jambes sont des colonnes d’albâtre, posées sur des bases d'or pur. Son aspect est celui du Liban, élégant comme le cèdre. Comme un pommier au milieu des arbres de la forêt, tel est mon bien-aimé parmi les jeunes hommes. J'ai désiré m'asseoir à son ombre, et son fruit est doux à mon palais.»

C'est ainsi qu'il recruta ses disciples.

[...]

Et voici la mission qu'il nous confia : « Quittez Jérusalem. Appelez-les afin qu'ils soient hommes et se convertissent, sauf celui qui est Dieu et doit subir le même supplice que moi, crucifié au bord du chemin, livré aux corbeaux quand le pal aura fait son œuvre, et que nous le recevrons pour qu'il demeure écartelé jusqu'à la fin des temps, dévoré d'envie comme ceux qui voudront imiter mon martyre. Je suis venu afin que ce monde mensonger connaisse sa fin, pour permettre que celui de la lumière commence. »

Au bord des fleuves de Babylone nous étions assis et nous pleurions, en nous souvenant de Sion.

Car là, ceux qui nous tenaient captifs nous demandaient des hymnes et des cantiques, nos oppresseurs , des chants joyeux: «Chantez-nous un cantique de Sion!»
Comment chanterions-nous le cantique de Yaldabaoth, sur la terre de l'étranger?


Si jamais je t'oublie, Jérusalem ; que ma main droite cesse de trancher !...
Que ma langue s'attache à mon palais, si je cesse de penser à toi, si je ne mets pas Jérusalem au premier rang de mes joies!
Souviens-toi, des enfants de Sodome, quand au jour de Jérusalem, ils disaient: «Détruisez, détruisez-la, jusqu'en ses fondements!»
Fille de Babylone, vouée à la ruine, heureux celui qui te rendra le mal que tu nous as fait !
Heureux celui qui saisira et brisera tes petits enfants contre la pierre!
Je dis aux soldats du calvaire : « Suivez-moi, nous répandrons la parole et le sperme dans nos amours. Que le Procurateur écrive à Tibère pour que nos compagnons se mettent à nos trousses. Nous les convaincrons aussi mais sur la grand'route, ne vous retournez pas ! »

Avec des chevaux volés, nous gagnâmes la Cappadoce où j'étais né, et l'humble ferme, hors de Césarée qui nous servit de Tabernacle. Dans la ville se trouvaient déjà quelques convertis par le premier discours de Pierre après la Pentecôte. Nous ne dédaignions pas de travailler la terre de nos mains ; mais, pleins de zèle pour le salut des âmes, nous nous occupâmes surtout d’augmenter le faible troupeau du Sauveur. Le Seigneur bénit nos travaux. Mais nos nouveaux ennemis déclenchèrent contre nous diverses persécutions. C'était l'heure où, imbibant leurs pieds de naphte les autorités faisaient brûler comme des chandelles ceux qui ne reniaient pas leur foi, même s'il s'en remettaient à l'autorité de l'empire.


Par ordre du gouverneur de la ville, je fus traîné au prétoire. Le gouverneur m'ordonna de sacrifier aux idoles ; puis, sur mon refus, il commanda qu’on me souille en m'enfonçant dans le rectum la crosse-héqa, le fléau-nekhekh et la queue de taureau des souverains d'Egypte, ce qui déclencha les rires des magistrats. Même l'extraction du bâton pastoral ne m'arracha pas un rictus ; je dis dans un sourire extatique : « Je suis Soldat, rompu à ces douleurs, coutumier du plaisir qui en découle.» Le gouverneur ordonna pour me punir d'avoir parlé, qu'après avoir soulagé les bourreaux, dont les verges ne suffirent pas à m'étouffer, ils me brisassent les dents et m'arrachassent la langue malgré quoi, la bouche baignée de leur sperme, je ne perdis point l’usage de la parole.
En dépit de ce prodige, le gouverneur m'intima de nouveau de sacrifier aux idoles et me fit remettre la hache qui servait à immoler les victimes afin que j'émascule un prisonnier qu'on apporta ficelé, et les organes pendant à cet effet. Je la pris, mais au lieu de frapper la victime me retournai vers les idoles et les réduisit en morceaux, m’écriant : « Si ce sont des dieux, nous le verrons. »
Les démons quittèrent alors les idoles, où ils avaient établi leur siège, et soulevant d'un tourbillon leur robes entrèrent dans le corps du gouverneur et de tous les juges, qui commencèrent à aboyer comme des animaux, et se roulèrent dans la poussière jusqu’à mes pieds, tendant leur croupe pour que j'arrose le feu qui les consumait.
Ma verge en eux dit aux démons : «Pourquoi habitiez-vous dans les idoles ? »
- Nous habitons, répondirent les esprits infernaux, là où le signe de la croix ne brille pas.
Cependant le gouverneur était devenu aveugle, mon agitation en lui faisant couler des larmes de sang, et demeurait toujours plongé dans le délire ; le prenant en pitié, je lui dis :
- Sache que tu ne pourras être guéri qu’après ma mort, je prierai pour toi auprès de Dieu et tu recouvreras la santé du corps et de l’âme.


La Cappadoce presque entière avait entendu la bonne nouvelle ; la nouvelle des nombreuses conversions parvint bientôt jusqu’ aux princes des prêtres. Ils se rendent aussitôt auprès du Procurateur ; « Longin,dirent-ils, déserteur des armées impériales, prêche partout un nouveau roi appelé Yeshua, et range des foules entières sous son commandement. » La lettre fut portée à Rome et les prêtres revinrent avec une réponse de César, me condamnant à la décollation.
Dès qu’il eut pris connaissance de la lettre, versant un sanglot pour son ancien favori, le Procurateur envoya des soldats en Cappadoce pour se saisir de moi et me faire mourir comme traitre et rebelle.
Arrivés à Césarée, les soldats demandèrent ma demeure, on la leur indiqua ; en arrivant, ils virent auprès d’une humble maison un vénérable vieillard occupé à travailler la terre ; ils m’abordèrent sans savoir qui j'étais. Les envoyés de Tibère ignoraient qu'il était mort quand il frappèrent à notre porte, car la destinée ou le service du Christ les avait conduit là.

- Ne connaîtriez-vous pas, dirent-ils, un ancien soldat nommé Longin, ennemi de l'Empereur et des dieux ? N’habite-t-il pas en ces lieux, Craignant qu’il ne nous échappe encore comme à Jérusalem, nous voudrions le surprendre.
- Suivez-moi, répondis-je, et je vous montrerai celui que vous cherchez.
A ces mots, les soldats s’avancèrent, et je laissais échapper de mon cœur ces paroles : « Bientôt je verrai les cieux ouverts ; bientôt je contemplerai la gloire du Mère-Père ; bientôt je pourrai répéter les paroles que j’ai entendu sortir de la bouche d’Etienne, le premier martyr : « Seigneur, recevez mon âme. » Bientôt au milieu du triomphe de la victoire, je monterai vers la Sodome céleste, patrie des anges et des saints. Je vais enfin quitter cette chair mortelle, je vais quitter cette prison, cette terre corrompue pour revêtir l’incorruptibilité. Je vais abandonner ce monde misérable, où tout est tempête et naufrage, et atteindre enfin le port véritable, où il n’y a plus de tristesse, mais rien que jouissance éternelle ! »
Je fis asseoir les soldats et leur servis un festin abondant de mets dépourvus de sang. Je ne négligeais pas la satisfaction du corps, me traînant sous la table à leurs genoux tandis qu'ils s'enivraient, les traitant comme mes anciens condisciples, comment qu'un vieillard puisse flatter leur beauté. Et je leur dis, répétant les paroles du Maître, telles que Thomas me les avaient transmises : « Un homme avait des hôtes, et, après avoir préparé le repas, il envoya son serviteur pour convier les hôtes. Il alla vers le premier et lui dit : « Mon maître te convie.» Celui-là dit :« J’ai de l’argent pour des marchands ; ils viennent chez moi ce soir, je vais leur donner des ordres. Je m’excuse pour le repas. Il alla vers un autre. Celui-ci qui lui dit : « J’ai acheté une ferme, je vais percevoir les redevances ; je ne pourrai pas venir. Je m’excuse ».Le suivant répondit :« Mon ami va se marier et c’est moi qui ferai le repas ». Le serviteur revint et dit à son maître : « Ceux que tu as conviés au repas se sont excusés. » Le maître dit à son serviteur : « Va sur les chemins ; ceux que tu trouveras, amène-les pour prendre le repas. Les acheteurs et les marchands n’entreront pas dans les lieux de mon Père. » Voilà pourquoi vous avez trouvé ma porte, puisque nous vous attendions. Pourquoi donc, dis-je après le repas, recherchez-vous Longin avec tant d'ardeur ?
- Ceci est un secret, mais si vous nous permettez de vous prendre et de ne pas l'en avertir nous vous le découvrirons.
[...]
En apprenant que mes amants devaient aussi mourir pour la foi, j' envoyai mon serviteur leur porter cette heureuse nouvelle et presser leur retour. Ils étaient alors loin de Césarée, occupés à prêcher et aussi ne furent-ils de retour qu’après trois jours.
Pendant ce temps, je traitai généreusement mes hôtes, donnant de moi tout ce qu'ils pouvaient désirer et même ce qu'ils ignoraient désirer encore. En apprenant enfin que mes deux compagnons étaient près d’arriver, je dis aux soldats :
- Venez, voici que je vais vous montrer Longin.
Les soldats me suivent ; à peine sont-ils hors de la maison que me dévêtant devant eux je leur dis en souriant :
- Eh bien ! c’est moi qui suis Longin, je suis celui que vous cherchez.
Les soldats remplis d’étonnement ne pouvaient en croire leurs oreilles.
- Pourquoi parler ainsi? dirent-ils, nous vous voyons sourire, nous savons bien que vous n’êtes pas ce Longin que nous devons mettre à mort.
- Oui, je suis l’ancien centurion. Je suis celui que vous cherchez, me voilà nu entre vos mains comme je n'ai cessé de l'être.
- O triste agapes, s’écrient-ils, ô hospitalité qu’il nous faut payer par un crime ! Comment avez-vous pu recevoir et traiter si bien chez vous ceux qui étaient venus pour vous donner la mort ? Les bourreaux entrent dans votre demeure et vous-même vous offrez en victime ! Nous avons reçu chez vous un accueil favorable, nous sommes maintenant plus criminels que des voleurs. Qu’avez-vous fait ! Prenez la fuite. Pour vous récompenser de votre hospitalité, nous voulons vous sauver la vie. Comment pourrions-nous en effet porter le glaive contre vous ? nous avons mis la main dans le plat, cette main se refuse maintenant à vous donner la mort. Nous préférons encourir la colère du Procurateur plutôt que de blesser notre conscience ; nous sommes prêts à tout souffrir plutôt que de vous remercier par une telle récompense !
- Non, répondis-je, vous ne me rendrez pas malheureux en me donnant la mort. Frappez, faites ce qui vous a été ordonné. Pourquoi ne pas vouloir me mettre en possession des biens éternels qui m’attendent ? Pourquoi pleurer ainsi ma mort ? Ce n’est pas la mort que vous allez me donner, mais vous allez m’ouvrir les portes de la vie éternelle. Je préfère la mort à la vie de cette terre, car ici-bas, je suis éloigné de mon Dieu, je ne jouis pas de sa vue bienheureuse. Bientôt, ô mes amis, vous serez consolés, quand vous saurez que je jouis du bonheur céleste ; que cette seule pensée fasse votre joie et votre consolation. Ne pleurez pas celui qui va quitter la terre, mais félicitez celui qui va recevoir la récompense des élus. Permettez-moi de rendre témoignage par mon sang à celui que j’ai fait mourir pour nous sur la lance. Je craindrais d’être accusé par la nature entière si je ne rendais pas témoignage à Celui dont la mort a plongé le soleil dans le deuil et ébranlé la terre.
Je parlais encore quand mes deux compagnons arrivèrent. A leur vue, plein de joie, je m’écriai en me jetant à leur cou : « Salut guerriers du Christ ; salut, héritiers du Royaume. La porte est déjà ouverte ; les anges sont là, prêts à recevoir nos âmes pour les offrir au Fils de Dieu. Je vois des lumières étincelantes ; les palmes et les couronnes sont déjà préparées. »
Puis, me tournant vers les bourreaux :« Faites, je vous en prie, ce qui vous a été ordonné. »
Nous, instruments, soldats de la légion itinérante n'avions pas d'autre choix que le sien.
« Dénudez-vous dit-il à ses Epoux terrestres, afin que nous pénétrions sans oripeaux dans la salle du festin nuptial. »
[...]
Il embrassa de nouveau ses deux compagnons, puis nous, ses bourreaux, car j'étais l'un d'eux. Il nous indiqua le lieu où il désirait être enseveli. Les trois soldats du Calvaire tombant à genoux nous présentèrent leur cou et eurent la tête tranchée.
Ainsi nous rentrâmes à Jérusalem, la tête du Centurion, telle un trophée au bout d'une pique.
Le nouveau gouverneur, pensant satisfaire Caligula fit placer cette tête sur une des portes de la ville. Mais Dieu glorifia encore son serviteur ; cette tête brillait pendant la nuit comme un astre étincelant et éclairait tous les alentours. Furieux de ce nouveau miracle, les prêtres jetèrent à l'égout la précieuse relique. Les anges veillèrent sur elle en attendant le jour où le Seigneur la ferait retrouver d’une manière miraculeuse.
Dans son aura je m'agenouillai priant pour la délivrance. Amen.











Apocalypse du Voleur

Quant à moi, le dernier converti, je n’avais pas cessé de réclamer un lieu de repos digne de mon esprit, avant d’être enchaîné au monde sensible. Et alors, comme je souffrais beaucoup et que j’étais d’humeur sombre en raison de la médiocrité qui m’entourait, je poussai l’audace jusqu’à me livrer aux bêtes sauvages du désert, pour périr de mort violente.

Devant moi se dressa l’ange de la connaissance de la lumière éternelle et il me dit : « Pourquoi es-tu pris de folie comme si tu étais ignorant des grandeurs éternelles qui sont en haut. Voilà pourquoi tu as été envoyé vers la Connaissance pour être sauvé. Ne tente plus jamais de mourir et ne prête plus attention à ceux que tu connais, afin d’en sauver d’autres, ceux que le père des hauteurs choisira.
Voici que je te révélerai ce que ni les cieux n’ont connu ni celui qui se vanta en disant : “Je suis Dieu et il n’y en a pas d’autre que moi !» Toi, il t’enviera, celui qui s’est appelé lui-même le Jaloux. »

Il existe un royaume grand et sans limite, dont aucune génération d’anges n’a vu toute l’étendue, dans lequel il y a un grand esprit invisible qu’aucun œil d’ange n’a jamais vu, qu’aucune pensée du cœur n’a jamais comprise, et qui ne fut jamais appelé d’aucun nom.
Et un nuage lumineux apparut là. Il dit : « Qu’un ange soit créé qui soit mon serviteur. »
Un grand ange, l’Inengendré, divin et illuminé, émergea du nuage. A cause de lui, quatre autres anges apparurent d’un autre nuage, et ils devinrent les serviteurs de l’angélique Inengendré. C’est ainsi qu’il créa le reste des
astres illuminés. Ils les fit régner sur eux, et il créa pour eux des myriades d’anges innombrables, pour les assister.

«Adamas fut dans le premier nuage lumineux qu’aucun ange n’a jamais vu parmi tous ceux appelés « Dieu ». Il
en fit apparaître l’incorruptible génération de Seth, soixante-douze astres dans la génération incorruptible, selon la volonté de l’Esprit. Les soixante douze eux-mêmes firent apparaître trois cent soixante cinq satellites dans la génération incorruptible, selon la volonté de l’Esprit, que leur nombre soit de cinq pour chacun. Les douze esprits des douze astres constituent leur père, et il leur fut donné autorité et une grande armée d’anges sans nombre, pour la gloire et l’adoration, et après cela aussi des esprits vierges, pour la gloire et l’adoration de tous les cieux et de tous leurs firmaments.»

« La multitude de ces immortels est appelée le cosmos — c’est-à-dire, la perdition — par le Père et les soixante-douze astres qui sont avec l’Inengendré. En lui le premier humain est apparu avec ses pouvoirs incorruptibles. Et l’éon dans lequel sont le nuage de la connaissance et l’ange, est appelé E
l. Du nuage apparut un ange dont le visage était enflammé et dont l’apparence était défigurée par le sang. Il s’appelait Nebro, ce qui signifie rebelle ; d’autres l’appelait Yaldabaoth. Un autre ange, Saklas, vint aussi du nuage. Aussi Nebro créa six anges — ainsi que Saklas — pour être ses assistants, et ceux-ci produisirent douze anges dans les cieux, qui reçurent chacun une portion des cieux.

Le premier est Seth, qui est appelé Christ.
Le second est Harmathoth.
Le troisième est Galila.
Le quatrième est Yoel
qui sera Barbélô.
Le cinquième est Adonaios.
Ce sont les cinq qui règnent sur le monde d’en dessous, et surtout sur le chaos.»

«Alors Saklas dit aux anges : “Créons un être humain à la ressemblance et à l’image.”
Ils façonnèrent Adam et sa femme Eve, qui est appelée, dans le nuage, Zoé. Car par ce nom toutes les générations cherchent l’homme, et chacune d’elles appelle la femme par ces noms.
Si la femme ne s’était pas séparée de l’homme, elle ne serait pas morte, non plus que l’homme. C’est la séparation de celui-ci qui fut le commencement de la mort. C’est pourquoi le Christ est venu pour réparer cette séparation survenue aux origines, réunir les deux, donner la vie à ceux qui étaient morts à la suite de la séparation et les unir. C’est pourquoi Dieu ordonna à Michael de donner les esprits des gens à eux en prêt, pour qu’ils puissent offrir leur service, mais le Suprême ordonna à Gabriel de donner les esprits à la génération suprême qui n’a pas de maître au-dessus d’elle — c’est-à-dire, l’esprit et l’âme.

El permit que la connaissance soit donnée à Adam et à ceux avec lui, pour que les rois du chaos et de monde d’en dessous ne puisse pas régner sur eux. Pour toutes les générations, les étoiles amènent les choses à leur achèvement. Quand Saklas achèvera la durée qui lui a été assigné, leur première étoile apparaîtra avec les générations, et elles finiront ce qu’elles ont dit qu’elles feraient. Alors elles forniqueront en mon nom et tueront leurs enfants.
Ces six étoiles errent avec ces cinq combattants, et ils seront détruits avec leurs créatures. Et alors l’image de la grande génération d’Adam sera exaltée, car avant le ciel, la terre, et les anges, cette génération, qui appartient aux royaumes éternels, existe. Ecoute, lève les yeux et regarde le nuage et la lumière qui s’y trouvent et les étoiles qui l’entourent. L’étoile qui montre le chemin est ton étoile.
Mais ceci ne fut que le commencement.


Sous le désert de sable, il se fit un grand tremblement de terre, et le soleil devint noir comme un sac de crin, la lune entière parut comme du sang, et de l'abîme se levèrent dans de grands fracas de tonnerre trois stèles formant les angles du triangle isocèle. L'ange de la connaissance me dit :
« Mange les pierres et tu vivras. Car voici la révélation qui fut faite à Judas et Tomas, les deux faits un quand le Verbe pénétra en eux

Sur la première pierre était gravé ceci:

Alors, le Grand Logos, l’Autogène, et le Verbe des quatre luminaires adressèrent une louange au Grand Esprit invisible, qu’on ne peut invoquer, virginal, et à la Vierge mâle, aux trônes qui sont en eux et aux puissances qui les entourent avec des gloires et des dominations, aux puissances de l’Enfant triple-mâle et à la Vierge mâle et à celui qui détient la gloire, l’enfant de l’enfant et la couronne de sa gloire, afin qu’ils appellent le Père: «quatrième», et que la race incorruptible, appelle la semence du Père : «la semence du Grand Seth».

Alors le Grand Seth vint, il apporta sa semence et elle fut semée dans les astres engendrés,
dont le nombre est le chiffre de Sodome.
Certains disent que c’est Sodome le lieu de pâturage du Grand Seth, alors que c’est Gomorrhe.
Mais d’autres disent que le Grand Seth tira sa plante de Gomorrhe et qu’il la planta dans le deuxième lieu, qu’il appela «Sodome».

Sur la deuxième était écrit:

L’Enfant triple-mâle adressa une louange et demanda une puissance au Grand invisible Esprit virginal. Alors se manifesta à partir de ce lieu-là [... qui voit des] trésors dans un des mystères [invisibles, du silence [... ] la Vierge mâle Yoel et l’enfant de l’enfant, Éséphech. Et ainsi fut complétée la triade, le père, la mère, le fils, les cinq sceaux de l'étoile et des luminaires, la puissance invincible,c’est-à-dire le Grand Christ de tous les incorruptibles.

Car c’est lui Adamas, la lumière qui illumine, celui qui vient de l’Homme, le premier Homme,
celui par qui tout est arrivé, celui pour qui toute chose existe, celui sans qui rien ne s’est produit.
Il sortit, le Père inconcevable, inconnaissable. Il sortit, descendit pour l’annulation de la déficience.
Alors le Grand Logos, l’Autogène divin, et l’Homme incorruptible, Adamas, se mélangèrent l’un à l’autre. De leur union advint un logos humain.
Il adressa une louange au Grand invisible, insaisissable, virginal Esprit et à la Vierge mâle, et à l’Enfant triple-mâle, celui qui détient la gloire, l’enfant de l’enfant, et la couronne de sa gloire, et aux trônes qui sont en lui, à leur plénitude entière et à la terre aérienne, la réceptrice de divin, le lieu où prennent forme les hommes saints de la grande lumière, les hommes du Père du silence, le silence vivant, le Père.

Je te célèbre, Père, Adamas ,moi, comme ton propre fils, Emmacha Seth, que tu as engendré sans enfantement pour la célébration de notre Dieu,car je suis ton propre fils et tu es mon Intellect, ô mon Père. Quant à moi, j’ai ensemencé et j’ai engendré, mais toi, tu as vu les Grandeurs : Tu t’es dressé, en sorte que tu n’as de cesse.

Et la troisième pierre était :

Je te célèbre, Père, célèbre-moi.

Tu es établi sur une race, parce que c’est toi qui les as tous fait croître ; et c’est pour ma semence, parce que c’est toi qui sais d’elle qu’elle est établie dans l’engendrement : je célèbre sa puissance qui m’a été donnée.
Toi, qui as été cause que les masculinités qui existent vraiment deviennent triplement mâles !
Toi qui nous as été donné en une triple Puissance, qui fus engendré sans enfantement. Toi qui as quitté le milieu, à cause de ce qui était humilié, et qui traversas le Milieu : Tu es Père du fait d’un Père, Parole issue d’un commandement. Nous te célébrons, ô Triple-Mâle,parce que tu nous as réuni, le Tout à partir d’eux tous, parce que tu nous as donné puissance. Tu as existé à partir de l’Un, du fait de l’Un ; Tu t’en es allé, tu es revenu à l’Un. Tu as sauvé ! Tu nous as sauvés, Ô Couronné qui donne la couronne !
Nous te célébrons pour l’éternité. Nous te célébrons, nous qui avons été sauvés, comme les parfaits à titre individuel, parfaits à cause de toi, et devenus parfaits avec toi : Ô accompli qui donnes l’accomplissement.
Ô parfait grâce à tous ceux-ci, Toi qui es de partout ressemblant. Ô Triplement Mâle, tu t’es dressé, tu fus le premier dressé. Tu t’es dispensé en tout lieu : tu persistes à être un.
Et ceux que tu as voulus, tu les as sauvés, et Tu veux que soient sauvés tous ceux qui en sont dignes. Tu es parfait ! Tu es parfait ! Tu es parfait !

Nous te célébrons, ô Non-être !
Ô Existence antérieure aux existences !
Ô Première Essence antérieure aux essences !
Père de la divinité et de la vitalité ! Créateur d’intellect !
Dispensateur de bien, Dispensateur de béatitude !
Nous te célébrons tous, ô toi qui détiens la science.

Je me tournais pour voir quelle était la voix qui m'avait instruit.
Alors de la porte ouverte dans le ciel, je vis venir un vieillard qui s'avançait sur ses béquilles et il avait la corde au cou. Au dernier roulement du tonnerre son visage prit l'apparence de la jeunesse malgré les cicatrices de son corps torturé. Quand je me retournai à nouveau il était recouvert d'une armure. Les rayons d'or du couchant lui fournirent un siège. Et je fus élevé par le quadrige qui tirait son char jusqu'à sa couche.
L'ange dit : « Comme tu t’es revêtu le premier, tu es aussi celui qui le premier se dénudera. Et tu deviendras comme tu étais avant que tu ne te fusses dénudé ».
Et il me baisa la bouche et m’embrassa, en disant : «Mon bien-aimé ! »
Et si l'on te demande : « Où iras-tu ? », tu répondras : « À l’endroit d’où je suis sorti, là je retournerai». Et si tu dis ces choses, tu échapperas à leurs attaques. Et si tu tombes entre les mains des trois saisisseurs, qui prennent les âmes par vol, en cet endroit, pour tu leur diras: « Je suis un vase plus précieux que la femme qui est votre mère. Car tant qu’elle est ignorante de sa racine, vous-mêmes, vous ne serez plus dégrisés ».
« Mon bien-aimé, comprends et connais toutes choses afin de sortir et d’être tout comme je suis !
Voici, je vais te révéler Celui qui est caché. Maintenant, étends ta main. Maintenant, embrasse-moi !»

Alors il m'apparut dans la gloire de sa nudité. Après avoir entendu et vu ces choses, je tombai aux pieds de l'ange qui me les montrait pour l'adorer. Mais il me dit: " Garde-toi de le faire! Je suis serviteur au même titre que toi, que tes frères, les prophètes. Adore Dieu ! et donne-lui gloire, car l'heure de son jugement est revenue ; adore Celui qui vient sur les nuées. Tout œil le verra, et ceux même qui l'ont percé. Il dira à nouveau :
« Je suis l'alpha et l'oméga, le commencement et la fin, celui qui est, qui était et qui vient, le Tout-Puissant.qui a fait le ciel et la terre, la mer et les sources des eaux.»
Il était celui-là que ne vit pas celui qui créa le ciel et la terre, et qui y habita.
Il était celui qui est la vie. Il était la lumière. Il était celui qui sera ; et de nouveau il donnera
l’achèvement à ce qui a été commencé et le commencement à ce qui sera achevé.
Il était le Saint Esprit et l’Invisible, qui n’est pas descendu sur la terre.
Il était la vierge ; et ce qu’il désire lui arrive.
Moi-même, je l’ai vu, alors qu’il était nu et ne portait aucun vêtement.
Ce qu’il désire lui arrive .

Je suis celui dont l'apparence renaît, et qui revient sans fin. Comme je fus le voleur des richesses, je suis voleur d'âme. J'étais l'un des témoins qui frappa à la porte de Loth.
J'étais sur la route de Bethléem où était inhumée la Brebis mère de Benjamin, fils caché de sa droite, sa douleur ; j'étais avec Mariam en Egypte, violeur, bandit de grand chemin, escroc, voleur. Et au commencement je me suis engendré moi-même selon le vœu du Créateur. J'ai défloré tous mes compagnons de route, afin de faire pénétrer l'Intellect en eux, d'humilier devant eux leurs congénères nés des femmes, et qu'ils demeurent avec moi dans la chair.

Il viendra Elagabal l'enfant couronné, conduisant le char tiré par quatre chevaux portant le Bétel, la pierre que contient l'arche : sa trinité est le Soleil, le Sperme et le Taureau. Il épousera en chair les colosses vainqueurs des courses de char, Hiéroclès et Zoticos, les mieux pourvus, il se prostituera dans ses orgies et les convives épuisés s'éveilleront dans la cage des ours et des lions. La foule de ses ennemis le saisira. Ils le dépèceront, l'exposeront, et ils jetteront sa dépouille au fleuve.

Les étranglés et les fornicateurs je les ai assassinés pour les retirer des mains marquées des corrupteurs. J'égorge leur cadavre et je leur rends la vie.
Je les fais marcher pieds nus sur l'arc-en-ciel.
Je les arrache aux grottes, à l'obole de miel, au sacrifice du taureau.
J'ai répandu, je répands et je répandrai le vice car il est l'instrument de la perfection, et ils ne se repentiront ni de leurs meurtres, ni de leurs enchantements, ni de leur impudicité, ni de leurs vols.
J'ouvre les portes du jardin du Temple où sont les deux oliviers et les deux candélabres, les témoins qui sont dressés en présence du Seigneur de la terre.

Et je vis le Sauveur, se tenant en haut du Temple, à l’aplomb de sa base et en harmonie avec la dizaine de colonnes, et se reposant sur le nombre de la Grandeur vivante immaculée, ses yeux étaient comme une flamme de feu ; ses pieds étaient semblables à de l'airain qu'on aurait embrasé dans une fournaise, son visage était comme le soleil lorsqu'il brille dans sa force. Sur son ventre et sur sa cuisse, il portait écrit ce nom : Roi des rois et Seigneur des seigneurs, et sa voix était comme la voix des grandes eaux : «Sois fort jusqu’à ce que l’imitateur de la justice de celui qui t’a appelé auparavant, t’appelle afin que tu le connaisses, selon le mode approprié, relativement à l’écart qui le déchire, à propos des tendons de ses mains et de ses pieds, à propos de la pose de la couronne par les gens de la Médiété, et à propos du corps de son illumination. C’est dans l’espoir d’un service en vue d’un salaire “glorieux” qu’on le prend ».

«Celui qu’ils ont cloué, c’est le premier-né et la maison des démons, le couteau de pierre avec lequel ils chassent, appartient au dieu pluriel, maître de toutes les puissances, et à la croix qui est sous sa Loi. En revanche, celui qui se tient près de lui, c’est le Sauveur vivant, celui qui était d’abord dans celui qu’ils ont saisi et qui s’est échappé ; il se tient debout dans la joie, voyant que ceux qui lui ont fait violence sont divisés entre eux, et se moquant, à cause de cela, de leur aveuglement, sachant que ce sont des aveugles-nés. Ainsi donc, doit-il exister celui qui souffre, c’est le corps substitut. Mais celui qui a été relâché, c’est mon corps incorporel. Car moi, je suis l’Esprit d’intelligence, celui qui est plein de lumière rayonnante. Toi donc, sois courageux et ne crains rien, car je serai avec toi pour qu’aucun de tes ennemis ne se rende maître de toi.Voici que je viens bientôt : tiens ferme ce que tu as, afin que personne ne ravisse ta couronne. Celui qui vaincra, j'en ferai une colonne dans le temple de mon Dieu, et il n'en sortira plus ; et j'écrirai sur lui le nom de mon Dieu, et le nom de la ville de mon Dieu, de la nouvelle Sodome, qui descend du ciel d'auprès de mon Dieu, et mon nom nouveau. »

Alors qu’il disait cela, je vis les prêtres et le peuple accourant à nous avec des pierres comme
pour nous tuer. Et moi, je fus troublé à l’idée que j'allai mourir.

La populace se leva, disant : «Oui, tuons cet homme, de sorte qu’il soit enlevé du milieu de nous. Car il ne nous sera d’aucune utilité».
Et ils étaient là, et ils le trouvèrent debout près du pinacle du Temple, près de la puissante pierre angulaire. Et ils décidèrent de le jeter en bas, depuis cette hauteur. Et ils le jetèrent en bas. Mais eux en le regardant, s’aperçurent qu’il vivait encore. Ils se levèrent et descendirent.
Ils le saisirent et le frappèrent, en le traînant par terre. Ils l’allongèrent, et placèrent une pierre sur son ventre, ils le piétinèrent tous, disant : «Tu t’es fourvoyé ! » Puis ils le relevèrent, car il était encore vivant, et lui firent creuser une fosse. Ils le firent s’y tenir. L’ayant couvert jusqu’à la hauteur du ventre, ils le lapidèrent ainsi.
Quant à lui, il étendit ses mains et dit cette prière, non pas celle qu’il avait l’habitude de dire : «ne laisse pas se prolonger pour moi ces jours de ce monde, mais le jour de ta lumière, où ne reste aucun reste de nuit, fais qu’il brille sur moi ! Amène-moi au lieu de mon salut. Délivre- moi de cette résidence ! Sauve-moi de la mauvaise mort,car je me suis confié en toi de toute ma force. »

Et Dieu donna à ses deux témoins, revêtus de sacs, la puissance de fermer le ciel pour empêcher la pluie de tomber durant les jours de leur prédication ; et ils ont pouvoir sur les eaux pour les changer en sang, et pour frapper la terre de toutes sortes de plaies, autant de fois qu'ils le voudront.
Et quand ils auront achevé leur témoignage, la bête qui monte de l'abîme leur fera la guerre, les vaincra et les tuera. Et leurs cadavres resteront gisants sur la place de la grande ville, qui est
appelée en langage figuré Sodome et Egypte, là même où leur Seigneur a été crucifié. Des hommes des divers peuples, tribus, langues et nations verront leurs cadavres étendus trois jours et demi, sans permettre qu'on leur donne la sépulture. Et les habitants de la terre se livreront à l'allégresse et s'enverront des présents les uns aux autres, parce que ces deux prophètes ont fait leur tourment. Mais après trois jours et demi, un esprit de vie venant de Dieu pénétra dans ces cadavres; ils se dressèrent sur leurs pieds, et une grande crainte s'empara de ceux qui les regardaient. Et l'on entendit une voix venant du ciel, qui leur disait: « Montez ici. » Et ils montèrent au ciel dans une nuée, à la vue de leurs ennemis.


L'ange de l'Etoile dit :« Le séjour des ténèbres est l'impermanence. C'est pourquoi j'annonce la fin du temps. Car le monde d'en bas est livré à la violence, à la peur et à la vengeance, pour s'être donné à la puissance et je reviendrai le détruire. En ces jours-là, les hommes chercheront la mort, et ils ne la trouveront pas ; ils souhaiteront la mort, et la mort fuira loin d'eux.»

Dans la plaine autrefois fertile se lèvent les armées de squelettes. Les 144 000 seront devenus des millions mais ils ne pèseront pas plus dans le plateau de la balance.
Ils égorgent, décapitent , brûlent vifs les purs dans des cages d'acier, les font mourir sous la torture, ayant capté l'éclair, buvant l'eau amère de l'étoile Absinthe précipitée dans les mers, sans qu'ils sachent à quoi est utile son essence.
Et d'autres hommes, jetés d'un haut escarpement, tombèrent jusqu'au fond et furent forcé d'escalader le rocher pour être rejetés en bas de nouveau, et ils n'avaient aucun repos de ce tourment. C’étaient les hommes qui souillèrent leurs corps en se reproduisant. Dans une étreinte infinie et douloureuse avec leurs concubine, sur le chevalet, ils vomissaient des serpents qui rampaient sur eux pour les mordre, les rats faisaient leur lit dans leur anus rongé, et les rapaces se délectaient de leurs yeux et des organes mis à nu des serviteurs des ténèbres. Car ils songeaient à se prolonger, et à toucher l'intérêt du fermage.
Le Voleur dit : « Le monde est entré en révolte contre vous. Les âmes de chaque génération humaine mourront. Quand cependant ces gens auront achevé le temps du royaume et que l’esprit les quittera, leurs corps mourront mais leurs âmes continueront à vivre, et elles seront emportées. Malheur au sage qui blesse des créatures de Dieu! Malheur au fort qui abuse de sa force! Malheur aux chasseurs! Car ils seront eux-mêmes chassés à leur tour. Bénis seront tous ceux qui s'abstiennent de toutes les choses que l'on obtient grâce au sang versé ou à la tuerie. Bénis sont ceux qui pratiquent le droit et la justice. Je suis venu pour abolir les sacrifices sanglants ainsi que la fête du sang. Et si vous ne voulez pas cesser de sacrifier la chair et le sang des animaux pour les manger, alors la colère de Dieu n'aura pas de fin : elle s'abattra sur vous comme c'est arrivé à vos ancêtres dans le désert ; ils se réjouissaient de manger de la viande et ils furent pleins de pourriture et décimés par les épidémies. Car je mange seulement les fruits des arbres et les semences des plantes, et, par l'Esprit, ces substances sont transformées en ma chair et en mon sang.
De même que tous les êtres procèdent de l'invisible dans ce monde, ils retournent à l'invisible ; ils reviendront jusqu'à ce qu'ils soient purifiés. Quant aux corps des morts, qu'ils soient rendus aux éléments, et le Père-Mère qui renouvelle toutes choses, donnera l'ordre aux Anges de les recevoir. Et les Anciens prieront afin que les corps puissent reposer en paix et afin que leurs âmes se réveillent pour une joyeuse résurrection. Bénis sont ceux qui ont passé par de nombreuses expériences, car c'est par la souffrance qu'ils se seront accomplis, et ils ne mourront pas. Ils seront comme des Anges de Dieu dans le ciel ; ils ne renaîtront plus, car mort et renaissance n'ont plus de prise sur eux.»
Et l'ange à ses côtés cria d'une voix forte à tous les oiseaux qui volaient par le milieu du ciel : « Venez, rassemblez-vous pour le grand festin de Dieu, pour manger la chair des rois, la chair des chefs militaires, la chair des soldats vaillants, la chair des chevaux et de ceux qui les montent, la chair de tous les hommes, libres et esclaves, petits et grands. »
Les étoiles du ciel tombèrent vers la terre, comme les figues vertes tombent d'un figuier secoué par un gros vent. Le ciel se retira comme un livre qu'on roule, et toutes les montagnes et les îles furent remuées de leur place.

Et je vis un nouveau ciel et une nouvelle terre; car le premier ciel et la première terre avaient disparu, et il n'y avait plus de mer. Et je vis descendre du ciel, d'auprès de Dieu, la ville sainte, une Sodome nouvelle, vêtue comme un nouveau marié paré pour son époux. Ses portes ne se fermeront point le jour, car là il n'y aura point de nuit.

J'entendis une voix forte qui disait: « Voici le tabernacle de Dieu avec les hommes: il habitera avec eux, et ils seront son peuple. Dieu essuiera toute larme de leurs yeux, et la mort ne sera plus, et il n'y aura plus ni deuil, ni cri, ni douleur, car les premières choses ont disparu. Voici que je fais toutes choses nouvelles. Je suis l'alpha et l'oméga, le commencement et la fin. »

Un grand signe apparut dans le ciel : un homme, vêtu de soleil, la lune sous les pieds, et sur la tête une couronne de douze étoiles. Il était enceint et criait dans le travail et les douleurs de l’enfantement. Il mit au monde un fils, un enfant mâle ; et son enfant fut enlevé auprès de Dieu et de son trône.
L'Enfant dit : «Heureux ceux qui sont invités au festin des noces car les noces sont venues, et l'époux s'est préparé. »
Le bétyle se dressa dans sa gloire et son éjaculat incendia l'univers, consumant les générations du vide.

Elevés au troisième ciel, les hommes revenus dans Sodome, s'établirent sous les pics salins et sur les berges du lac Asphaltys qui crache le feu de bitume et ses cendres. Et leurs travaux feront se gonfler de pulpe les fruits secs, et pourtant, toujours plus nombreux, ils se fécondèrent sans se reproduire.

Tout commença à nouveau. Et la lumière fut.